Archives par mot-clé : Séance publique du 26 juin 2023 (journée du 26 juin)

Le nécessaire engagement de l’État dans la lutte contre les discriminations dans le travail !

2023 - Plan métropolitain de lutte contre les discriminations - 1° volet : emploi -

Mme la Conseillère ARTHAUD : Monsieur le Président, madame la Vice-Présidente, cher-e-s collègues, l’emploi est le premier domaine de discrimination des femmes selon le défenseur des droits. La discrimination au travail peut concerner : l’embauche ou le licenciement d’un-e salarié-e, le renouvellement d’un contrat, la mutation ou promotion à un autre poste en interne, le salaire et toutes les formes de rémunération, la formation, le reclassement ou les tâches confiées.

En droit, les salarié-e-s, les stagiaires et apprenti-e-s sont protégé-e-s contre les discriminations par le Code du travail (article L. 1132-1).

Nous avions déjà eu l’occasion de rappeler des chiffres qui témoignent bel et bien d’une inégalité de fait entre les femmes et les hommes. Reprenons aujourd’hui ceux autour de l’emploi :

– Tous temps de travail confondus, les femmes touchent 28,5 % de moins en salaire que les hommes. 1 femme sur 3 travaille à temps partiel contre 1 homme sur 10.

– À temps de travail égal, les femmes touchent 16,8 % de moins que les hommes.

– Femmes et hommes n’exercent pas les mêmes emplois. Les métiers et les postes majoritairement exercés par des femmes sont aussi, souvent, les moins bien payés. Pourtant, à temps de travail et métiers équivalents, les femmes touchent 5,3 % de moins que les hommes.

Les discriminations ont un caractère systémique et répété, et produisent des effets délétères sur les carrières : chômage prolongé, démission, licenciements, mesures de rétorsion et, donc, des effets sur la santé et les relations sociales.

Nous nous réjouissons donc que le premier volet du plan métropolitain de lutte contre les discriminations prenne à bras-le-corps cette question, l’emploi étant à la fois ce qui permet un revenu assurant, normalement, de vivre décemment, mais aussi de s’émanciper à travers les relations professionnelles et l’acquisition de savoir-faire. « Le travail des femmes est un droit, mais il est également une nécessité. Le travail est la seule école où l’on peut apprendre la vie, la liberté et l’indépendance. », écrivait, en 1921, Alexandra Kollontaï, première femme ministre.

Ce plan métropolitain de lutte contre les discriminations se décline à la fois dans le rôle d’employeur de la Métropole, mais aussi dans les politiques publiques menées sur le territoire métropolitain. Il est articulé autour de plusieurs objectifs :

– Garantir le respect du principe d’égalité dans l’accès à l’emploi et le déroulement de carrière, quelle que soit sa situation ou ses caractéristiques personnelles ;

– Reconnaître et prendre en compte les vécus discriminatoires des personnes confrontées aux discriminations dans l’emploi ;

– Mettre la prévention et la lutte contre les discriminations au cœur des politiques publiques et des pratiques professionnelles des acteurs de l’emploi-insertion ;

– Contribuer au devoir d’exemplarité des acteurs publics et à une meilleure qualité de service en garantissant l’égalité de traitement et la non-discrimination à l’emploi ;

– Assurer l’effectivité du droit de la non-discrimination en améliorant l’accès au droit des personnes victimes de discrimination.

Ce plan débute dans un premier cercle de partenaires de deux villes (services et élu-e-s) de Lyon et Villeurbanne, et de la Maison métropolitaine d’insertion pour l’emploi.

Même si nous nous félicitons de l’avancée pour les droits et la lutte contre les discriminations que constitue ce plan, nous ne pouvons passer sous silence le nécessaire engagement de l’État dans la lutte contre les discriminations dans le travail. Pour exemple, aujourd’hui, 59 % des entreprises de plus de 50 salarié-e-s ne respectent pas la loi et n’ont ni accord ni plan d’action sur l’égalité professionnelle

Nous, communistes, voulons conquérir l’égalité professionnelle : les inégalités se sont réduites jusqu’en 1990, puis plus rien ! Les femmes travaillent, concentrées dans seulement 12 familles professionnelles sur 87 et qui sont non reconnues et sous-payées, alors que depuis plus de 30 ans elles sont plus diplômées que les hommes. Elles occupent des postes moins qualifiés, moins valorisés. La société patriarcale maintient les femmes dans un statut d’infériorité. Le patronat utilise le travail des femmes comme un laboratoire d’expérimentation afin d’étendre la précarité, la flexibilité et le temps partiel à l’ensemble du monde du travail.

J’ai, ici, essentiellement consacré mon intervention sur les discriminations qui sont liées au genre, mais la délibération porte bien sur l’ensemble de toutes les formes de discriminations au travail et, partout, l’égalité professionnelle ne se négocie pas.

Je vous remercie.

La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/vipD47obbQU?t=20152

La santé est un droit universel !

2023-1728 - Schéma directeur métropolitain en faveur des personnes âgées et des personnes en situation de handicap - 2023-2027 -

Mme la Vice-Présidente PICARD : Monsieur le Président, mesdames, messieurs, la Métropole de Lyon possède la responsabilité de veiller, sur son territoire, à la cohérence des actions menées par les différents acteurs dans le champ de l’autonomie, en concertation avec l’Agence régionale de santé.

Le Schéma directeur métropolitain en faveur des personnes âgées et des personnes en situation de handicap 2023-2027 est un document cadre utile. Nous pouvons féliciter la méthode transversale d’élaboration de ce schéma, qui s’articule avec le projet métropolitain des solidarités et les projets sociaux de territoire.

Avec le vieillissement de la population, de nouveaux défis sont devant nous. Le diagnostic montre, sans surprise, que l’offre en hébergement est insuffisante pour combler les besoins de notre Métropole. Il montre aussi un maillage territorial inégal.

L’ARS doit s’engager dans la création d’EHPAD -maintes fois demandées par les communes, qui expriment un besoin bien réel.

Le développement du maintien à domicile peut apporter certaines réponses. Mais c’est aussi une solution par défaut, quand l’usager ne peut pas payer une place en EHPAD. Le diagnostic nous rappelle que le public âgé n’est pas épargné par la pauvreté, avec un taux plus élevé à Vénissieux, Vaulx-en-Velin et Saint-Fons. Encore une fois, sans surprise.

Les services de soins infirmiers à domicile se retrouvent à devoir gérer des personnes qui auraient besoin d’un hébergement médicalisé. Les soignants sont amenés à effectuer des interventions à domicile plus longues et plus lourdes. Le patient ne reçoit pas toujours le soin adapté à ses besoins. Et il y a également des conséquences pour les aidants.

 Actuellement, l’ensemble des besoins liés au vieillissement ne sont déjà pas couverts et, au vu de l’augmentation des chiffres annoncés, nous allons tout droit vers de graves difficultés pour les usagers. L’État, via l’ARS, doit prendre ses responsabilités et développer les services nécessaires pour aujourd’hui et pour l’avenir.

Le vieillissement de la population, les pathologies liées au grand âge et la perte d’autonomie provoqueraient une hausse des dépenses de protection sociale de l’ordre de 100 milliards d’euros à l’horizon 2040. Pour être à la hauteur de cet enjeu de société, l’État doit mettre en place un véritable service public de l’autonomie. Il y a nécessité d’un effort supplémentaire en matière de solidarité nationale. Toute autre démarche renforcerait la privatisation de l’accès aux soins et une inégalité d’accès à la santé.

Permettez-moi d’établir un lien évident avec la fermeture des urgences de nuit de l’hôpital des Portes du sud depuis le 6 mars. Nous avons tous été mis au pied du mur, sans aucune information, les usagers comme les maires du territoire.

À Givors, les urgences de nuit de l’hôpital Montgelas sont fermées depuis plus d’un an et demi alors que la fermeture ne devait durer qu’un mois.

Lorsque l’on commence à fermer les urgences de nuit, c’est toute la dynamique de l’hôpital qui est perturbé avec la crainte de fermetures en cascade des autres services. Pour l’hôpital des Portes du sud, cela impacte les populations de douze communes utilisatrices.

La situation est identique dans le domaine de la psychiatrie avec, notamment, la fermeture d’unités à l’hôpital Saint-Jean de Dieu. Or, ces services sont utiles et nécessaires pour les habitants de nos territoires.

Le comité de soutien des Portes du Sud CGT, les maires des communes de Saint-Fons, Feyzin, Corbas et Vénissieux, les élus ainsi que les usagers et professionnels de santé se mobilisent. Nous avons demandé à l’ARS qu’une délégation soit reçue et que soient débloqués, sans attendre, les moyens nécessaires à la réouverture des urgences.

La santé est un droit universel. Il est de la responsabilité de l’État et de son représentant, l’ARS, de maintenir l’égalité entre les territoires et l’équité entre les habitants.

Je vous remercie.

La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/vipD47obbQU?t=14662

Il faut remettre en cause, nationalement, la loi ZFE…

2023-1701 - Deuxième étape du projet d’amplification de la Zone à faibles émissions (ZFE) de la Métropole de Lyon -

M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, le nouveau projet d’amplification de la ZFE que vous nous proposez tient compte de la longue concertation organisée l’an dernier, de l’expression de l’ensemble des partenaires et des études qui montrent l’ampleur de l’impact social que portait, notamment, le projet de zone étendue.

Nous l’avons dit dès votre annonce, monsieur le Président, vous avez eu raison. Le projet présenté fin 2021 était trop complexe, trop peu compréhensible, trop injuste géographiquement et socialement.

Mais une année a passé et le débat public, local comme national, s’est poursuivi, mettant en débat non seulement votre proposition mais la loi elle-même, cette loi dont nous rappelons qu’elle n’a été votée que par la majorité présidentielle.

Et nous sommes en quelque sorte au pied du mur devant les conséquences inévitables d’une loi mal conçue, reposant sur des outils -dont l’étiquette Crit’Air, inadaptée à l’objectif poursuivi-, justifiés dans un débat sur la qualité de l’air marqué par des messages anxiogènes, reposant sur des interprétations statistiques erronées. Au final, le seul argument factuel est la référence aux sanctions européennes contre la France, mais permettez-nous de contester la soumission de notre droit au droit européen. Nous contestons ces sanctions de la part d’une Union européenne qui ne se préoccupe que de ce que les milliers de lobbyistes, financés par les entreprises, lui demandent à Bruxelles, et qui n’a pas un mot pour la première des inégalités d’espérance de vie, celle liée au travail, bien connue pourtant de tous les statisticiens. Au contraire, l’Union européenne est un des outils de la dégradation des conditions de travail, de la concurrence, de la précarité et, donc, de la perte d’espérance de vie due au travail pour les catégories populaires.

Reste alors le vrai défi qui nous intéresse : comment poursuivre l’amélioration constatée de la qualité de l’air depuis des décennies ? comment se placer sur une trajectoire qui nous permette d’atteindre les seuils préconisés par l’OMS et qui ont été durcis l’an dernier ?

Sauf que cet objectif n’a pas de sens s’il est pris « hors sol », sans tenir compte de la dimension sociale au cœur des inégalités environnementales. Comme le dit un économiste de Sciences-Po et à l’université de Stanford : « Tant que les injonctions à la sobriété collective voisineront avec le spectacle du luxe, la transition écologique sera source de défiance ». Une traduction concrète est qu’il est impossible de créer le consensus minimum sur une règlementation de type ZFE tant que des SUV hybrides de deux tonnes seront autorisés quand on interdit de vieilles berlines de familles populaires.

Oui, vous avez raison, c’est la loi qui est faite ainsi et nous le répétons, elle est mal faite, elle est même totalement contreproductive et il est urgent d’annuler cette loi et de réouvrir le dossier au plan national : prendre en compte non pas seulement l’âge du véhicule, mais son état technique ; prendre en compte toutes les émissions, et pas seulement les émissions de combustion et mettre d’abord l’accent sur l’accompagnement au changement de mobilité et, donc, sur le développement du fret pour permettre celui du rail passager, donc des RER, du renforcement de tous les modes actifs, des mobilités à la demande, de la location, du partage, …

C’est ce que la Métropole engage dans ses politiques mobilité -mais de manière limitée par l’absence de l’État et de la Région : sans perspective pour le RER ; sans ambition suffisante, faute de financement sur les transports en commun lourds ; sans pouvoir surmonter les difficultés des TCL, que ce soit sur le taux de service ou la qualité de service dû aux sous-capacités, au manque de ressources- trop lentement sur le développement du maillage du territoire et de la réponse massive aux besoins de mobilité de tous…

Les communistes ont longuement discuté de ce projet et nous avons organisé une consultation dans la métropole, dont le résultat est sans appel. 70 % s’expriment contre ce projet, pas par opposition à vos objectifs, monsieur le Président, mais contre cette loi qui ne nous permet pas d’apporter une vraie réponse au droit à une mobilité propre.

Il y a deux raisons majeures à ce résultat :

– D’abord, les communistes considèrent que nous ne sommes pas au niveau sur la réponse aux besoins de transport collectif, sur l’accessibilité de ces transports pour tous malgré les efforts faits sur la gratuité et les tarifs sociaux.

– Ensuite, nous ne pouvons pas nous résoudre à accepter que la ZFE ne repose, au final, que sur la sanction et un système de radar représentant 100 millions d’euros pour ce qui ne peut être vécu que comme une injustice. Seuls les pauvres seront impactés et au final, comme en Angleterre, ce système ne peut être vécu que comme un péage. Je vous rappelle que, de l’autre côté de la Manche, les ZFE se traduisent simplement par un prix d’entrée supérieur pour les véhicules polluants, bref, un péage.

C’est pourquoi nous voterons avec regret « contre » cette délibération. Nous répétons sans attendre à l’opposition, qui croira pouvoir utiliser ce vote pour dénoncer la majorité métropolitaine, qu’elle ferait mieux de cesser les jeux politiciens que nous dénoncions en introduction de ce Conseil face aux urgences démocratiques. Je rappelle, monsieur Gascon, que vous demandiez en 2018 l’extension de la ZFE à Saint-Priest pour que les habitants de l’est bénéficient aussi d’un air plus pur… Ce n’est pas notre majorité qui est en difficulté sur ce dossier, c’est l’État ! C’est pourquoi nous appelons toutes les forces progressistes et républicaines à interpeller le gouvernement pour changer la loi !

Je vous remercie.

La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/vipD47obbQU?t=5866

La France craque, et la démocratie avec…

Intervention préalable -

M. le Conseiller MILLET : La France va mal. Nous sommes nombreux à être préoccupés des conditions de la vie publique dans une société qui se présentait comme un modèle, mais qui est de plus en plus regardée comme à bout de souffle, incapable non seulement d’ouvrir l’espoir d’une vie plus juste mais aussi incapable de se parler dans une démocratie écartelée entre marketing publicitaire des réseaux et actions violentes.

La société craque, des milliers d’individus craquent. La situation dramatique de la psychiatrie laisse des centaines de personnes en souffrance psychique sans accompagnement. Il suffit de rester quelques heures dans ce bâtiment côté rue du lac et observer la violence des rapports entre SDF installés sur le trottoir. Mais c’est le constat de tous les bailleurs sociaux pour qui les crises psychiques de locataires deviennent une préoccupation du quotidien. Jusqu’à ces dérapages de citoyens ordinaires dans des conflits a priori banals de la rue, des bagarres après un léger accrochage ou pour une place de stationnement, jusqu’à la terrible situation du maire de Saint-Brévin… Je ne cède pas aux dérives médiatiques qui font de chaque incident, à Bordeaux dernièrement, une leçon générale, mais il faut dire que notre société souffre.

Et comment ne pas voir le rapport avec l’état de nos services publics dans l’accueil et l’accompagnement. Les urgentistes et tous les soignants le disent depuis des années quand ils dénoncent la casse de l’hôpital public, qui fait des urgences le réceptacle de tous les maux de la société. D’ailleurs, notre Conseil devrait interpeler l’ARS pour la réouverture des urgences de Portes du Sud, de Givors, des lits d’urgence du Vinatier, … Je vous appelle tous à rejoindre l’action engagée par les quatre maires des communes voisines de l’hôpital Portes du Sud pour faire pression sur l’ARS et rompre, enfin, avec son programme de réduction de l’offre publique de soins pour respecter l’objectif national des dépenses maladie.

Et comment être surpris que ces tensions se retrouvent dans les actions sociales, quand notre régime politique peut imposer une réforme contre l’avis très largement majoritaire des salariés, des citoyens ! Et ce n’est pas propre à la réforme des retraites, ni à ce président ou ce gouvernement ! Droite et gauche gouvernementale ont clairement dit au peuple français que son avis ne comptait pas quand le « non » au référendum de 2005 a été violé par les gouvernements successifs, jusqu’à soumettre la France aux diktats de la Commission européenne. J’en reparlerai à propos de la ZFE.

Mais on retrouve cette crise démocratique dans le refus de consulter les citoyens de Pierre-Bénite et Oullins sur le projet de fusion de leurs communes. Nous appelons -au nom de la place des communes dans notre métropole, de leurs 59 maires que tant d’entre vous ont dit défendre mais que deux d’entre eux viennent de décider qu’ils ne seraient plus que 58- à l’organisation d’un référendum, qui était obligatoire il y a 20 ans -obligation supprimée par des réformes successives, dont la loi MAPTAM tant critiquée. C’est l’enjeu de la place des communes dans la métropole, sauf à considérer que l’avenir est au regroupement de communes à l’échelle des territoires de la métropole, du type arrondissements ou Villeurbanne.

Ce coup médiatique de deux maires -en écho à celui de deux présidents, il y a 10 ans, annonçant à leurs collègues médusés la création de la Métropole- illustre cette crise démocratique. Ce n’est pas avec un peuple ayant perdu sa citoyenneté qu’on fait une démocratie.

Ce déclin démocratique est au cœur des dérives individuelles ou collectives qui font désormais notre vie publique : désobéissance, désarmement, éco-sabotage, insurrection, ZAD, blacks blocs, … ce que montrent les violences dans Lyon, mercredi dernier en soirée, entre manifestants derrière une banderole anarchiste et bandes fascistes ou comme l’avaient montré les attaques contre la mairie du 1er ou du 4ème en marge de manifestation sociales, il y a quelques semaines. Des images qu’on retrouve un peu partout dans des manifestations, notamment environnementales. La fuite en avant du gouvernement interdisant un mouvement sans organisation ni responsable montre son incapacité à comprendre cette crise démocratique, et le vide du grand débat après la crise des Gilets jaunes.

Mais nous sommes dans la même situation quand une association ne peut pas inviter Salah Hamouri, Franco-palestinien que le président de la République lui-même avait tenté de faire sortir des prisons israéliennes ou il était détenu sans jugement, que nous avions reçu à Grigny, Givors et Vénissieux, il y a quelques années, sans aucun problème ni inquiétude de quiconque ! Comment interdire une rencontre organisée par une association dont les dirigeants sont bien connus et ne peuvent être soupçonnés de violence, au prétexte officiel que des extrémistes connus pourraient venir perturber cette rencontre. Un comble ! Ce sont les victimes supposées qui deviennent coupables aux yeux du Préfet ! C’est aussi illustratif de notre crise démocratique.

Et c’est dangereux parce que l’extrême-droite a pris une place grandissante en Israël comme dans tout l’Occident, de Trump à Duda et jusqu’en France, non seulement électoralement, mais avec des groupes violents qui se développent, dans les stades comme les centres urbains, des réseaux d’ultradroite dont le ministère de l’Intérieur lui-même dit craindre des actes terroristes.

Dans un tel contexte, l’opposition va jouer avec un vœu, en fin de séance, le jeu politicien de la division. Mais les républicains qui sont parmi vous -républicain au sens littéral, pas politicien- ne voient-ils pas que cette démarche même est illustrative du dramatique échec de notre démocratie ? De cette incapacité à organiser un débat public en vérité, dans l’objectif premier non pas de gains de notoriété ou électoraux, mais pour construire l’unité des citoyens la plus large pour agir efficacement ?

Cette situation intenable défait le tissu citoyen. J’ai eu de longues discussions avec des jeunes engagés dans des mouvements comme Extinction Rébellion et d’autres, tentant de les convaincre qu’ils confondaient les techniques et le système, que l’éco-sabotage visant à mettre en cause les autres pour leurs comportements était une impasse tant les inégalités sont au cœur de cette société, et que c’est cette société qu’il faut changer, pas les gens… vieux débat pour un marxiste… Mais l’absence de perspective politique progressiste, la récupération de tout discours environnemental par les grandes entreprises comme par les gouvernements rendent illisibles la nature de l’affrontement. Les communistes prendront toute leur responsabilité pour montrer l’enjeu premier, celui des luttes de classe et, donc, le chemin indispensable, celui de l’unité du peuple pour imposer sa souveraineté.

Le mouvement communiste a connu les dérives de la violence légitimée comme moyen d’action. Cela a conduit aux Brigades rouges, noyautées par les services d’État, la loge P2 et la CIA pour éliminer Aldo Moro. Lénine le dénonçait déjà après l’expérience de son frère anarchiste préparant un attentat contre le tsar et, bien évidemment, arrêté et exécuté. La violence pour l’action sociale est d’abord une source de division, une justification des répressions. Il y a toujours des mouvements de colère qui peuvent dégénérer, mais quand on travaille à unir les habitants des quartiers populaires, je peux vous assurer qu’on sait que la violence entre citoyens est une impasse.

Permettez-moi une conclusion optimiste en évoquant un évènement marquant du premier festival Jeunes de Vénissieux. Des groupes d’adolescents de nos équipements polyvalents jeunesse, après un travail sur l’éloquence, avaient organisé une soirée de performances dont un débat « pour ou contre le vote ». Deux jeunes de 17 ans avaient préparé une longue joute orale extraordinaire, qui devrait être diffusée largement.

Contre un qui défendait la nécessité d’aller voter, une jeune fille critiquait un droit de vote jugé inutile. Elle avait conclu ses interventions par une belle formule évoquant l’engagement des jeunes de quartier pour sortir de toute prédestination sociale : « plus la lutte est difficile, plus la victoire est belle ». Quelques jours plus tard, j’avais écouté le discours de victoire de la déléguée syndicale CGT des Vertbaudet, après une grève de deux mois qui avait permis de fortes augmentations de salaires et des embauches de précaires, et elle disait elle aussi : « plus la lutte est difficile, plus la victoire est belle ».

Voilà une conclusion qui, monsieur le Vice-Président à la politique de la ville, madame la Vice-Présidente à la participation citoyenne, pourrait être au cœur de notre prochain contrat de ville : l’engagement. Nous ne sortirons pas de la crise démocratique par une réforme institutionnelle mais par un puissant mouvement d’engagement populaire, fondé sur l’effort collectif pour se comprendre, partager et construire, loin des violences et de la haine de l’autre qu’on rencontre trop souvent… un mouvement pour une nouvelle citoyenneté qui ailler chercher aux sources des révolutions françaises une nouvelle République sociale…

La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/vipD47obbQU?t=1562