Mme la Vice-Présidente PICARD : Monsieur le Président, cette décision modificative constate les impacts budgétaires de la crise sanitaire et sociale sur les prévisions 2020. Elle identifie les diminutions de recettes liées au ralentissement économique et, en dépenses, elle retrace les soutiens au secteur économique, aux partenaires sociaux et associatifs. Le versement de la prime exceptionnelle Covid représente 2 M€ ; la hausse des dépenses liées au RSA, 28,1 M€ ; les mesures d’accompagnement d’urgence des ménages et des associations sont subventionnées à hauteur de 6M€, dont 1,3 M€ pour les impayés de loyers et de charges. Les capacités financières de la Métropole sont mobilisées pour répondre à l’urgence sociale, exacerbée par la crise sanitaire.
Le constat est alarmant pour le baromètre de la pauvreté, réalisé par Ipsos pour le Secours Populaire. Avec le Coronavirus, et la crise économique, un Français sur trois a subi une perte de revenus et beaucoup ont basculé dans la précarité. Au bout de deux mois de confinement, le Secours Populaire comptabilisait déjà 45 % de nouveaux bénéficiaires. 900 000 chômeurs supplémentaires sont attendus par l’Unedic fin 2020. La peur de tomber soi-même dans la pauvreté (57 %), est en hausse de 3 points, avec toutes les conséquences psychologiques imbriquées. Face à la détresse, le Secours Populaire mesure un élan de mobilisation avec 5 000 nouveaux bénévoles. Nous saluons leur engagement dans le combat contre le creusement des inégalités.
Nous pouvons également constater les capacités de réaction de la Métropole. Malgré les attaques continues -contre la libre-administration, la contractualisation, la baisse des dotations et la réforme de la fiscalité locale-, notre collectivité a encore la capacité d’agir pour répondre, à son niveau, à l’urgence sociale. Mais, l’action de la Métropole peut-elle être un contrepoids suffisant aux politiques Gouvernementales de casse du service public ? Peut-elle contrer les logiques économiques, qui conduisent à la dislocation de l’industrie et aux licenciements massifs ?
La crise économique que nous traversons touche de nombreux secteurs d’activités, notamment les PME et les commerces. Les grandes entreprises doivent-elles en rajouter et profiter de la crise pour installer plus de flexibilité, plus de licenciements, alors qu’elles sont rentables, font des bénéfices et profitent d’aides Gouvernementales ? D’après l’estimation de la Banque de France, depuis le 1er mars, l’avalanche de plans sociaux dans les grandes entreprises représente 51 000 destructions d’emplois.
Avec son plan de relance, le Gouvernement met 100 milliards sur la table. Non seulement, ce plan ne corrigera pas l’affaiblissement structurel de l’État mais il est dévoyé à l’application des orientations politiques En marche. Ce sont 20 milliards de cadeaux fiscaux aux entreprises, sans contreparties sociales, environnementales et d’emplois. Un véritable chèque en blanc, en oubliant, un peu vite, la centaine de milliards d’euros déversés, depuis 2013, au titre du CICE sans réelle efficacité sur l’emploi. Ne serait-il pas opportun de mettre en place une nouvelle doctrine en matière d’aides publiques aux entreprises, avec l’interdiction des plans sociaux et des licenciements boursiers ? Cela empêcherait des multinationales, comme Renault ou Air France, de continuer les licenciements.
La réduction des impôts de production est une fragilisation supplémentaire des ressources et de l’autonomie fiscale des collectivités territoriales. Alors que -pour maintenir l’action locale de soutien aux entreprises, aux commerces, aux artisans et répondre aux besoins des populations confrontées à l’aggravation du chômage- il est impératif de préserver ce lien fiscal entre collectivités, entreprises et habitants.
Quand l’État montre de sérieuses défaillances face à la Covid -avec un manque de cohérence total, une communication contradictoire, des directives et contre-directives-, les fonctionnaires publics territoriaux et les élus locaux sont sur le terrain pour pallier les manquements et venir en aide à des populations démunies et inquiètes. La pluie de milliards aux grandes entreprises passe de plus en plus mal à l’heure où nous votons, ici-même, une hausse nécessaire des dépenses liées au RSA et à l’heure où les lits de réanimation manquent.
Depuis vingt ans, nous dénonçons le démantèlement de la Sécurité sociale et le déclassement de l’hôpital public. Nous dénonçons les inégalités d’accès à la santé ainsi que la détérioration permanente des conditions de travail. Ce qu’il faut remettre en cause, c’est le système de financement des hôpitaux par tarification à l’activité, c’est le manque d’effectifs, ce sont des professions que l’on ignore, c’est un nombre de lits toujours insuffisant, c’est un secteur psychiatrique délaissé.
Après la première vague Covid, après les applaudissements de 20 heures, combien de personnels recrutés dans le secteur de la santé, combien de lits supplémentaires ? Les choix et les décisions de l’État ne vont pas dans le sens de l’intérêt général. Il y a de l’inquiétude et de l’incompréhension chez nos concitoyens. Et, dans les collectivités, les élus locaux se sentent bien seuls pour gérer la crise avec un empilement de mesures mal adaptées.
Nous réclamons de la cohérence.
Je vous remercie.