Archives par mot-clé : Commission générale du 3 mars 2022

Pour une grande concertation citoyenne « Destination 2040 » !

Les enseignements de la consultation publique sur le métro -

Mme la Conseillère BURRICAND : Monsieur le Président, chers collègues, à quelques jours du vote du budget 2022 au Sytral, cette présentation et ce débat sont bienvenus et nous vous en remercions.

Alors que les conséquences du Covid sur l’usage des transports en commun, les modes de vie et de travail semblent s’estomper, la guerre en Ukraine ouvre une nouvelle crise grave, de tous points de vue et notamment sur ses conséquences possibles sur notre économie, et nous ne pouvons faire comme si cela n’existait pas.

Notre projet de développement des transports urbains est-il à la hauteur des besoins des habitants de la métropole et de notre ambition de réduire, de manière importante, la place de la voiture dans les déplacements urbains ? Nous considérons que la réponse essentielle à cette question, dans une société où se déplacer est un droit ou, en tout cas, doit l’être, réside dans notre capacité à proposer des transports en commun rapides et sûrs ainsi qu’une tarification toujours plus accessible, la gratuité étant l’objectif à atteindre. Le début du mandat est marqué par un effort important sur la tarification sociale et le lancement de plusieurs lignes fortes et tramways. Comment poursuivons-nous ?

Nous sommes, en tout premier lieu, interrogés par les chiffres annoncés d’un retour à la fréquentation de 2019 en 2024, ce qui laisse encore deux années avec des baisses de recette concernant la billetterie. Cette situation est-elle inéluctable ? Si nous ne pouvons pas agir sur tous les facteurs -notamment le télétravail- n’y a-t-il pas, pour le Sytral et la Métropole, un enjeu à reconquérir des usagers que le Covid a repoussés vers leur voiture, pour de multiples raisons, et en faisons-nous un objectif ?

Ensuite, nous approuvons la hausse de la contribution de la Métropole au budget du Sytral comme la hausse du versement mobilité à 2 %. Mais cela suffit-il, et suffira-t-il, à répondre aux besoins dans les années qui viennent ? Il faudra évaluer ce niveau de contribution et de versement mobilité dans la durée, notamment avec l’extension de la ZFE jusqu’en 2026. Les trois scénarios d’investissement, y compris le plus élevé, méritent d’être, dans les mois qui viennent, précisés et enrichis quant à leur capacité à répondre aux besoins et à nos ambitions.

Enfin, l’État avait annoncé, fin 2021, une aide de presque 82 millions d’euros sur un certain nombre de projets (qui doivent se réaliser pour en bénéficier). Alors que l’État a créé les ZFE, alors que le transport s’impose comme une question essentielle et un droit, les collectivités ne sont-elles pas en droit de lui demander plus d’engagement quant au financement des transports collectifs et un soutien permanent, avec une baisse de la TVA à 5,5 % et une aide spécifique, compte tenu des augmentations de l’énergie présentes (et nous savons qu’elles sont encore, malheureusement, à venir). Je pense que, de ce point de vue-là, une véritable révolution du positionnement de l’État est nécessaire.

J’en viens, plus précisément, aux enseignements de la consultation métro et aux corridors. Je ne reviendrai pas dans le détail sur les propositions concernant chacun des corridors. Chaque ligne est toujours essentielle au regard de ceux qui pourraient en bénéficier et qui veulent, évidemment, le meilleur pour les concitoyens qui habitent ces zones. Nous savons que les ruptures de charge sont un frein à l’usage des transports en commun, surtout lorsqu’elles incluent un changement de mode de transport. C’est donc une question à prendre en compte dans le développement, et les coûts ne peuvent pas être le seul élément de décision. Il nous faut aussi être attentifs à l’égalité de traitement des habitants dans la Métropole et éviter tout ce qui peut nourrir des sentiments de relégation.

Tels que ces corridors sont évoqués, il nous semble que tout est étudié pour éviter d’avoir à prolonger ou à ouvrir de nouvelles lignes de métro. Le métro offre, pourtant, une très haute qualité de service. Plus particulièrement, sa vitesse constitue un avantage certain, lui permettant d’offrir des temps de parcours record pour desservir des pôles urbains. Le RER a, évidemment, un rôle très important à jouer, mais vous ne l’avez pas mis en discussion dans la présentation. Je sais bien qu’il n’est pas, d’abord, de la responsabilité de la Métropole et que c’est la responsabilité première de la Région mais, si nous voulions en débattre, il fallait l’inclure, d’une manière ou d’une autre, dans cette présentation.

Et, il nous semble qu’abandonner tout projet de métro, ça n’est pas à la hauteur des besoins et c’est aussi affaiblir le réseau métro déjà existant. C’est donc une question qui nous semble devoir être approfondie. Nous ne sommes pas au bout de la concertation sur ces questions et je rappelle notre proposition d’une grande concertation citoyenne faite par mon collègue Pierre-Alain Millet, tout à l’heure, « Destination 2040 ».

Enfin, nous accordons -et notamment au regard des consultations que nous avons eues sur la question de la ZFE comme sur la question du tram T10, ces dernières semaines- une grande importance à la qualité de service, au confort d’usage qui est un facteur complémentaire essentiel au transfert modal de la voiture vers les transports en commun et c’est, pour nous, tout l’enjeu d’un service public unifié dans lequel l’autorité organisatrice joue tout son rôle.

Je vous remercie.

La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/fH7H7Qn34VE?t=8677

Pour un autre Plan des mobilités métropolitaines !

Développement urbain et axes structurants de transport -

Monsieur le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, nous nous félicitons de la tenue de cette Commission générale, faisant suite à la concertation organisée par le SYTRAL sur des projets de métro.

Comme nous l’avons dit dans notre contribution, nous souhaitons élargir au débat pour une autre mobilité métropolitaine à long terme, avec une ambition claire sur la réduction de la part modale des voitures au service de la réduction des bouchons, de leurs temps perdu par les automobilistes et de leur impact sur la qualité de l’air. Cette ambition doit s’appuyer sur un Plan des mobilités qui tire les leçons de ce qu’il faut bien appeler un échec du Plan de déplacement urbain dont nous avons hérité.

Malgré les efforts et les réalisations, le PDU 2017-2030 n’est à la hauteur ni des besoins -les témoignages vécus d’usagers de transports bondés ou insuffisants sont légion-, ni de l’attractivité métropolitaine, ni de nos ambitions d’une métropole apaisée, ni de nos ambitions pour la qualité de l’air. En 2020, le président Kimelfeld avait proposé de tripler le budget du SYTRAL pour doubler le nombre de lignes de métro. Monsieur le Président, vous évoquiez vous-même, dans la campagne, ce triplement de l’investissement. Notre majorité a annoncé le doublement et la présentation nous annonce une hausse progressive de 150 à 200 M€ par an de contribution de la Métropole. Cela permet-il d’atteindre nos objectifs de mobilité ? La question reste ouverte. Comme nous le demandions dès le 27 juillet 2020, il faut un grand débat public pour redéfinir un Plan de déplacement urbain ayant l’ambition d’une part modale des transports en commun supérieure à celle de la voiture.

D’autant que le retour des bouchons confirme que le « monde d’après » n’est pas le monde rêvé ! Pire, il s’avère être un monde de guerre dont l’impact économique et social peut être terrible ; le coût des carburants pour les usagers, de l’électricité pour les transports en commun sont des facteurs déstabilisant de toute prévision.

Pour l’instant, si les modes actifs ont progressé fortement, si les transports en commun se rapprochent de leur niveau de 2019 et qu’on retrouve de plus en plus souvent des trams bondés, c’est la voiture qui sort gagnante… avec les bouchons.

C’est d’abord un enjeu sur le type de développement, centralisé autour de la ville centre ou « multipolaire » autour des nœuds de transport, et donc sur le type de développement économique qui, pour l’instant, conduit à l’augmentation des distances domicile-travail.

C’est un enjeu de la région urbaine et au-delà. Un quart des travailleurs de la métropole habitent autour. La première réponse est donc une ambition forte pour le rail passager. Oui, nous avons des gares et il y a des trains, mais insuffisants pour attirer une large part des 150 000 déplacements pendulaires entrant dans la métropole. C’est pourtant indispensable pour étudier, après la transformation des M6-M7, celle de Bonnevay en boulevard urbain apaisé ; ce qui est impossible sans développement accéléré d’un RER métropolitain.

Ensuite, nous savons tous que le métro est la réponse la plus structurante aux mobilités, avec le plus grand effet report modal de la voiture et le plus grand effet d’intermodalité en cohérence avec les autres lignes de transport (trams, bus, …). ll peut précéder le développement urbain, ce que la Vice-Présidente a montré dans sa présentation [1].

Les lignes de métro et tram déjà esquissées par le SYTRAL dans le PDU actuel ne peuvent suffire à cette ambition, avec une part modale des transports en commun qui augmentaient moins vite de 2017 à 2030 que de 2005 à 2015, laissant la part modale de la voiture à 35 %. La métropole de Lyon a 4 fois moins de stations et de lignes de métro que Barcelone.

Le Vice-Président nous rappelle souvent que 60 % des déplacements en voiture font moins de 3km. Ce n’est pas le cas des déplacements domicile-travail selon le dossier de concertation : en moyenne, 8km pour les Lyonnais ; 11km, pour la périphérie. Or, ce sont bien ces déplacements domicile-travail qui font les bouchons et qui demandent des alternatives qui ne peuvent être réduites aux modes actifs.

C’est pourquoi nous n’opposons aucun des projets de métro proposés, et que nous voulons ouvrir d’autres sujets :

– La desserte sud vers Corbas, Feyzin ?

– Les liaisons au sud vers Givors, au nord dans le Val de Saône ?

– Sur l’est lyonnais, l’A8 est-elle une réponse suffisante pour sortir des bouchons de Bonnevay et de l’A46 ? Ne faut-il pas, à très long terme, décider qu’il faudra des stations de métro plus loin à l’est ?

– Comment sortir de la fracture historique est-ouest, avec des liaisons pas seulement en étoile centrée sur Bellecour ou la Part-Dieu ? Ne faut-il pas aller, à très long terme, vers un « Grand Lyon Express » comme le projet parisien ?

Il faut, bien sûr, des projets finançables à l’échelle d’un ou deux mandats, mais nous avons besoin d’une vision à l’échelle des enjeux climatiques… 2040… 2050…

Une réduction forte de la part modale de la voiture demande un développement accéléré et massif du RER, des métros et des trams. Cela suppose des études globales, support d’une grande concertation citoyenne qu’on pourrait appeler « Destinations 2040 ». Engageons sans tarder la concertation sur le futur Plan de mobilités du nouveau SYTRAL.

[1] dans le cas de la Soie, à Vaulx en Velin ou à la Saulaie, à Oullins.

La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/fH7H7Qn34VE?t=2869