Pour un grand service public de l’énergie, au service des toutes et de tous, dans tous les territoires !

2022-1030 - Lyon - Contrat de concession de distribution d'électricité et de fourniture aux tarifs réglementés de vente -

M. le Conseiller DEBÛ : Monsieur le Président, mes chers collègues, si cette délibération peut paraître, par certains aspects, quelque peu « administrative », il n’en reste pas moins qu’elle recouvre un sujet structurant, surtout en cette période de hausse record des prix de l’énergie.

Ce contrat de concession met, d’ailleurs, particulièrement en lumière la pertinence d’un service public intégré de la production à la distribution d’électricité, au service de la population et de l’industrie, garantissant le droit fondamental à l’énergie, notamment grâce au mécanisme de la péréquation et à tarif réglementé. Ce mécanisme est bien exposé à l’art. 41 du contrat de concession.

On remarquera, d’ailleurs, que péréquation et tarif réglementé ne sont possibles que dans le cadre d’un service public national et qu’il s’agit de la traduction, dans les faits, d’un droit inhérent à chaque citoyen. C’est ici la démonstration de la supériorité, en matière d’égalité des territoires et de solidarité entre les citoyens, du service public sur l’entreprise concurrentielle.

C’est d’autant plus important à l’heure où 13 millions de nos concitoyens sont en situation de précarité énergétique. Il ne s’agit donc pas da baisser de 2° leur chauffage, mais de leur permettre de ne pas avoir froid chez eux. Et je ne saurais trop insister sur le fait que l’accès à l’énergie est un droit, et non le privilège des plus fortunés.

La période actuelle, avec un renchérissement extrêmement important des prix du gaz et du pétrole et la dépendance d’un nombre important de pays de l’Union Européenne au gaz russe, prouve, par ailleurs, la pertinence d’un modèle de production d’électricité fondé sur un mixte énergétique appuyé sur la production nucléaire, qui est une des garanties -non seulement de notre indépendance énergétique mais également de notre indépendance nationale.

Et si je reconnais bien volontiers que le nucléaire, comme tout moyen de production d’énergie, présente des risques en termes de sécurité et de retraitement des déchets notamment, il n’en reste pas moins que, lié aux énergies renouvelables, il permet à la France d’avoir, avec la Suède, la production la moins carbonée d’Europe, tout en assurant une sécurité d’approvisionnement et des prix bas.

Je ne saurais, d’ailleurs, résister au plaisir de vous citer le mode de détermination du tarif réglementé : « Le niveau des tarifs réglementés de vente d’électricité est déterminé par l’addition du prix d’accès régulé à l’électricité nucléaire historique, du coût du complément d’approvisionnement -qui inclut la garantie de capacité-, des coûts d’acheminement de l’électricité et des coûts de commercialisation ainsi que d’une rémunération normale de l’activité de fourniture.« 

Je ne résiste pas, non plus, au besoin de dénoncer cette ineptie libérale, dangereuse et contraire à l’intérêt collectif, qu’est la mise en place du mécanisme de l’ARENH (Accès régulé à l’électricité nucléaire historique), qui fait basculer l’entreprise nationale dans une logique absurde consistant à vendre sa production à perte à ses concurrents afin d’alimenter artificiellement un marché inopérant. C’est du vol pur et simple, au détriment de la Nation, pour satisfaire quelques intérêts capitalistiques privés.

L’ARENH rentre, d’ailleurs, en contradiction complète avec les dispositions énoncées à l’art. 22 du contrat de concession, relative à la lutte contre la précarité énergétique. Alors que nos collectivités et EDF/Enedis mettent en place des mécanismes de prévention, d’accompagnement et de sauvegarde des foyers les plus vulnérables -13 millions de personnes, je le rappelle-, les opérateurs privés ne s’embarrassent pas de considération de cet ordre. Si le client ne peut pas payer, alors ils résilient leurs abonnements (« résiliation à l’initiative du fournisseur »), contournant par là même la « trêve hivernale ». Comme quoi, il vaut toujours mieux être un usager qu’un client !

À rebours des logiques de privatisation, de la concurrence dite « libre et non faussée », de la jungle libérale du chacun contre tous, tout nous pousse à investir, non seulement dans un grand service public de l’énergie mais dans l’ensemble de la filière industrielle et dans la recherche.

Au-delà de la renationalisation d’EDF-GDF, l’État doit planifier et organiser l’ensemble de l’écosystème de l’industrie énergétique afin d’assurer, à la fois, la transition environnementale et notre souveraineté énergétique.

On notera, d’ailleurs, que c’est le fiasco total de la vente, par le ministre Macron, du secteur énergie d’Alstom à GE qui oblige aujourd’hui le président Macron à annoncer son rachat par EDF. Le risque était, en effet, grand de perdre notre capacité à produire les équipements nécessaires à notre production électrique -les turbines Arabelle, notamment. Si l’on ne peut qu’être soulagé du sauvetage de cette branche stratégique de notre industrie, on n’oubliera pas que cela s’est fait aux prix de nombreux licenciements et d’une perte de savoir-faire. Notre agglomération n’en est, d’ailleurs, pas sortie indemne, puisque nous avons deux sites -à Villeurbanne et à Saint-Priest- qui n’ont dû qu’à leur mobilisation d’être sauvés.

Le secteur des énergies renouvelables doit, évidemment, être intégrée à cet effort, tant il est vrai que la France est ultra-dépendante de l’étranger en terme d’équipement. Et, là encore, l’envolée des prix des métaux et gaz rares (lithium, cuivre, terres rares) -indispensables à la construction des panneaux photovoltaïques et des éoliennes-, va peser fortement sur notre capacité à déployer, pour un coût soutenable, les ENR en France.

Enfin, un dernier mot à l’occasion de la présentation de cette délibération. Si nous pouvons tous nous satisfaire de l’abandon, au moins momentané, du projet « Hercule » -qui avait mobilisé des milliers d’énergéticiens, d’élus, de collectifs locaux-, il n’en reste pas moins que les mécaniques de privatisation du secteur restent à l’œuvre -l’ARENH en est l’illustration la plus flagrante.

C’est pourquoi les salariés d’EDF et d’Enedis ont décidé de poursuivre leur rôle d’alerte et de lancer un collectif des territoires pour une énergie publique auquel plus de 1 000 élus locaux ont déjà répondu. Je ne saurais trop encourager notre collectivité, et ses élus, de rejoindre collectivement et individuellement ce collectif, qui œuvre avec détermination pour un grand service public de l’énergie, au service des toutes et de tous, dans tous les territoires.

Je vous remercie.

La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/m-nThOAIwnI?t=1887