Annonces parfois impressionnantes vs évaluations économiques très incertaines…

N° 2017-1955 - Villeurbanne - Station d'épuration de la Feyssine - Valorisation du biogaz -

M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, avec cette délibération, nous complétons le financement d’un dispositif de valorisation utile puisque, sans cela, nous brûlons des boues en chauffant l’air. Mais, il est intéressant de le situer dans le débat énergétique plus général.

C’est un projet de petite taille, avec un objectif de valorisation de 6 GWh, sachant que l’installation consomme 4GWh, soit un solde à valoriser de 2GWh, ce qui représente la consommation de chaleur de 450 logements, je crois, nous dit la délibération. Il est pourtant instructif de la réalité économique du biogaz.

Car si les annonces sont parfois impressionnantes, les évaluations économiques restent très incertaines. Ainsi, l’ADEME estime le potentiel de biogaz entre 100 à 250 TWh, en gros, la moitié de notre consommation nationale de gaz. Cette estimation est, sans doute, optimiste car il est difficile de prévoir l’équilibre entre les différentes valorisations possibles de la biomasse et le mix énergétique, notamment pour le transport entre l’électricité et le gaz.

Mais de toute façon nous n’en sommes pour l’instant qu’au tout début, puisqu’il n’y a en France que 26 installations d’injection en fonctionnement et 241 projets -ce qui montre l’intérêt bien sûr- mais des projets en attente avec des difficultés générales de financement car ils reposent tous sur un niveau significatif de subventions pour pouvoir être réalisés.

C’est d’ailleurs bien ce qui se passe dans le cas de la Feyssine puisque l’investissement de 3 M€, subventionné à 1 M€, ne devient pourtant économiquement rentable -et chacun se félicite d’un retour sur investissement court- que sur un prix vendu du biogaz à 12 €, soit plus du double du prix de marché du gaz. Évidemment, il sera impossible de passer à l’échelle dans un tel cadre économique fortement aidé.

Quant à l’efficacité de l’investissement, il faut 3 M€ pour produire 6 GWh -disons 5 GWh de chaleur- alors qu’une chaufferie biomasse de 6 M€ (deux fois plus chère) produit 60 GWh,, plus de dix fois plus, autrement dit l’investissement ici est dix fois moins efficace que l’investissement dans une chaufferie biogaz. Bien sûr, c’est bien mieux de produire quelque chose plutôt que de perdre l’énergie potentielle mais c’est le vrai débat que nous devons avoir en permanence dans cette transition énergétique qui est souvent pleine de non-dits.

On peut décider de subventionner une filière naissante -c’est même souvent indispensable car le marché, contrairement aux discours économiques dominants, est souvent peureux- mais il faut jouer la transparence pour un vrai débat public sur la meilleure utilisation raisonnée des ressources et un critère de décision : le coût de la tonne de carbone évitée. D’autant que chaque GWh produit a en fait consommé deux tiers de gaz naturel utilisé par la STEP, ce qui fait qu’il ne sera qu’un semi-biogaz. Il serait, d’ailleurs, curieux que les 6 GWh obtiennent le certificat d’énergie verte !

Dans ce cas, le choix entre la valorisation biogaz et la valorisation énergétique n’a jamais été éclairé dans la décision métropolitaine. Il est donc possible que ce choix ne soit pas le plus efficace, ni en terme de valorisation ni en terme de réduction des émissions carbonées. Nous y serons attentifs pour nos principales stations d’épuration, dont celle de Saint Fons qui continue, elle, à chauffer les petits oiseaux.

Je vous remercie.

Un vrai débat… pour un projet et une ambition pour la solidarité…

N° 2017-1943 - Projet de refonte des outils solidarité -

Mme la Conseillère BURRICAND : Monsieur le Président, chers collègues, cette délibération nous propose d’engager une dépense supplémentaire de près de 4 M€ pour permettre la mise à niveau du système informatique de solidarité.

De meilleurs outils informatiques pour travailler mieux, nous ne saurions nous y opposer mais il nous manque, pour apprécier le bien-fondé de ce qui est proposé, de pouvoir le replacer dans un projet et une ambition pour la solidarité, celle de réduire les inégalités et de ne laisser personne de côté.

Cela fait bientôt deux ans et demi, monsieur le Président, que vous avez récupéré les compétences sociales du Département, expliquant alors volontiers que, détenant tous les moyens d’interventions, vous alliez pouvoir montrer votre efficacité avec la Métropole. Mais nous sommes toujours en attente dans cette assemblée d’une discussion sur un projet global, une ambition, des objectifs au regard des besoins qui sont, comme vous le savez, croissants.

Nous devons nous contenter de délibérations dispersées, au jour le jour et entre diverses commissions, de rapports d’étape et d’états des lieux, certes très bien documentés mais auxquels il manque le caractère dialectique permettant de mesurer ce qui va et ne va pas, ce qui est fait et ce qui manque.

Monsieur le Président, si seulement vous mettiez autant de cœur et de détermination sur ces questions que sur le déclassement de l’autoroute, sur Confluence, sur la Cité de la gastronomie, sur la victoire d’En marche, alors où irions-nous ? Que ne nous indiquez-vous, monsieur le Président, que ne recherchez-vous, sur ces questions, une exemplarité d’excellence, comme vous prétendez le faire sur d’autres ? Et ce, d’autant que votre prédécesseur au Conseil général s’est plutôt contenté de faire ce qui lui était demandé de manière obligatoire, ce qui nous laisse un champ d’innovations assez formidable.

Plus concrètement, monsieur le Président, les axes déclinés dans cette délibération soulèvent quelques questions car, pour nous, les outils informatiques se conçoivent pour faciliter et gagner du temps, du temps en direction des usagers, du temps pour le travail social, pas pour se substituer au travail humain et aux liens directs qui restent, pour nous, essentiels. Vous parlez, par exemple, d’aider à compenser, avec ces outils, une volumétrie d’activités croissante dans un contexte de réduction de coût et de fonctionnement ; plus simplement, de plus en plus de gens en difficulté et de moins en moins d’argent.

Alors, monsieur le Président, nous aimerions en savoir un peu plus.

Qu’en est-il, par exemple, de l’évolution des effectifs, du nombre de postes vacants, des non-remplacements de personnels ? Il y a un an, vous ne démentiez pas que nous ayons 900 postes vacants, chiffre annoncé par les organisations syndicales ; et un grand nombre de ces postes sont sur les missions sociales. Où en sommes-nous aujourd’hui de ces vacances de postes ? Quel délai d’attente pour un premier rendez-vous ? Je n’ai pas vraiment besoin d’aller au cinéma pour mesurer les difficultés des usagers, je n’ai qu’à me promener dans Vénissieux. Donc quel délai d’attente pour un premier rendez-vous ? Quelle ambition pour la prévention et le dépistage des handicaps ? Combien d’infirmières scolaires ? Combien de médecins de PMI (protection maternelle et infantile) ? Quel soutien pour les familles confrontées aux addictions ? Quels objectifs de réduction de la pauvreté et du mal-logement pour les personnes vivant dans la rue ? Quels objectifs pour réduire le non-recours aux droits ? Quel temps d’attente pour traiter les dossiers en ce qui concerne les personnes handicapées et les personnes âgées ? Quel délai pour trouver une place en EHPAD (Établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes) ou en CANTOU (unité protégée Alzheimer) ?

Nous aimerions bien avoir des chiffres précis sur ces questions et nous fixer ensemble des objectifs ambitieux.

Vous annoncez aussi la volonté d’ouvrir le système informatique aux bénéficiaires. Vous dites d’ailleurs, dans cette délibération, « pour décharger la saisie ». Mais quels moyens alors pour vaincre la fracture numérique, la fracture même sur les questions de l’écriture et de la langue qui touchent trop de nos citoyens ? Il y a quelques expériences instructives dans ce domaine, instructives dans les difficultés qui sont survenues, notamment celles du Pôle emploi, et je pense qu’il faut que nous y soyons attentifs.

En somme, monsieur le Président, nous voudrions bien ne pas débattre au coup par coup de ces questions mais nous voudrions avoir un vrai débat dans notre assemblée, en nous fixant ensemble une ambition pour la solidarité. Ce débat a été plusieurs fois annoncé, il tarde à venir et les derniers événements nous laissent craindre qu’il ne soit pas encore pour tout de suite.

M. LE PRÉSIDENT : Merci bien. Monsieur Kimelfeld, peut-être quelques mots.

M. le Vice-Président KIMELFELD : Monsieur le Ministre, monsieur le Président, simplement pour dire à madame que nous mettons finalement la même énergie, la même attention particulière sur les problèmes de solidarité que sur tous les sujets que vous avez évoqués avant. Nous avons pu, au cours de ces derniers mois, travailler à l’élaboration du Projet métropolitain des solidarités. Je crois que c’est plus de 1 500 consultations, discussions, c’est aussi cinq grandes réunions qui ont réuni ici l’ensemble des élus et qui donneront lieu -et vous l’avez indiqué, vous demandiez à quel moment- à la rentrée, en septembre, à cette première présentation qui fera un état précis de nos discussions, de nos échanges avec les élus et l’ensemble des professionnels. Ces échanges ont eu lieu et nous aurons alors, à ce moment-là, une vision d’ensemble sur ces problématiques pour y apporter une réponse.

Deux commentaires…

N° 2017-1947 - Syndicat intercommunal de distribution d'eau du sud ouest lyonnais (SIDESOL) - Retrait -

M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, nous voterons ces deux délibérations -demandées, nous dit-on, par les Maires concernés- mais avec deux commentaires.

Le premier un peu amusé : par cette délibération nous tentons de faire comme si le périmètre métropolitain avait un sens géographique. Il y a tout juste quatre ans, dans le cadre du débat local sur le projet de loi créant la Métropole, j’écrivais ce que cette délibération confirme : « Selon qu’on regarde les espaces naturels, le transport et la logistique ou le logement, le périmètre du « fait » métropolitain est différent. C’est vrai pour l’économie, les bassins filtrants, les réseaux bleus, l’eau. En quelque sorte, à chaque domaine et, donc, à chaque compétence un périmètre pertinent pour porter les questions collectives de la Métropole. Il n’existe aucun fait métropolitain naturel. Il existe des réalités géographiques, économiques et sociales, des réalités d’interconnexions entre des territoires variés, à une échelle qui dépasse largement le périmètre de la Communauté urbaine ». -fin de citation-.

De fait, nous devons prendre acte que la géographie de l’eau ne correspond pas au périmètre de la Métropole administrative et qu’il serait stupide de chercher à raccorder les Communes de la vallée de l’Ozon au réseau d’eau lyonnais ou de nier la réalité des réseaux du sud-ouest lyonnais. Ces syndicats intercommunaux gèrent des réseaux qui correspondent à des réalités géographiques et historiques. Mais la Métropole a été pensée comme « une et indivisible », si je peux me permettre de paraphraser une caractéristique de la République que les réformes institutionnelles dites « de décentralisation » mettent à mal. Il faut donc absolument que les habitants des Communes concernées soient rattachés administrativement à l’eau de Lyon. Bref, il paraît que le Pacte de cohérence métropolitain devait permettre d’organiser la coopération entre Communes et Métropole mais, ici, on ne connaît qu’une règle, qu’une tête, celle de la Métropole.

Le deuxième commentaire porte sur les coûts parce que nous avons, dans cette délibération, des éléments juridiques mais aucun élément économique. Pour le SIAVO (Syndicat intercommunal d’assainissement de la vallée de l’Ozon), on attend un audit technique et financier. Pour l’Ozon, on sait qu’une nouvelle DSP va sans doute permettre de baisser les tarifs mais il y a alors deux solutions : soit ces tarifs rejoignent les tarifs métropolitains et les habitants ne gagneront alors rien de plus en étant rattachés administrativement à l’eau métropolitaine ; par contre, merci la complexité de suivi des coûts et la difficulté de la transparence et de l’équité de répartition. Ou bien les tarifs restent supérieurs et alors il y aura bien un surcoût payé par la Métropole. Le minimum aurait été d’en proposer une évaluation selon différentes hypothèses de tarifs de la future DSP.

Je vous remercie.

M. LE PRÉSIDENT : Merci bien. Monsieur Millet, je pense que vous n’avez pas totalement suivi le débat parce que ce que demandaient les Maires c’était justement de pouvoir sortir du syndicat, ce qui a été fait pour Marcy l’Étoile. Je peux dire à monsieur Barral que la Préfecture du Rhône va jeter un œil à vos demandes, dans la mesure où le contrat de DSP le liant à son exploitant s’achève à la fin d’année 2017.

Alerte à l’Opéra !

Courrier de Bernard Genin, Président du groupe, au Préfet le 20 avril 2017 -

Monsieur le Préfet,

Face à l’inquiétude et à la souffrance des salariés de l’Opéra national de Lyon, nous vous alertons sur la dégradation de leurs conditions de travail et vous engageons à porter toute l’attention nécessaire au rétablissement du dialogue social et des droits des personnels.

L’organisation du temps de travail de fait irrégulier, mais non planifié et dans les conditions actuelles de sous-effectifs, engendre surcharge de travail et pression sur les personnels, source de souffrance et de conflits. Nous vous alertons sur le  non-respect de la Convention signée entre l’Opéra, l’État, la Ville de Lyon, la Région et la Métropole. De plus, suite au conflit de novembre-décembre, un protocole a été signé mais, à ce jour, il n’est toujours pas respecté. Sur les 400 personnes employées par l’Opéra (250 Ville de Lyon, 160 privé), avec une vingtaine de postes de fonctionnaires gelés, le directeur n’a pour seuls recours que la précarité et la multiplication de recrutements d’intermittents.

En outre, les délocalisations des décors (en Italie), des costumes (en Roumanie), du mobilier (en Chine, en Inde) et des accessoires, entraînent une démotivation des personnels, avec un sentiment de dépréciation. La qualité moindre des productions réalisées en délocalisation oblige systématiquement à ce qu’ils soient repris, partiellement ou entièrement, par les ateliers de l’Opéra. Dès lors, quel est l’intérêt ? La direction défend ce système de productions délocalisées au travers de l’argument de la « coproduction ». Or, il ne s’agit pas de « coproduction » mais bien de délocalisation économique puisque le coût serait de moitié inférieur à celui d’un atelier de la région.

Le projet de la Fabrique de l’Opéra constituait de véritables perspectives d’améliorations pour les salariés, des conditions de travail renouvelées. Le désengagement de la Ville de Lyon et de la Métropole sur ce dossier, suscite l’incompréhension des personnels et un réel sentiment d’abandon accentué dans ce contexte de conditions de travail dégradées.

En trois ans, il y a eu 14 démissions, un licenciement, 11 procédures de licenciement ayant fait l’objet d’une procédure prud’homale. Aujourd’hui, les représentants des salariés souhaitent un vrai dialogue social et l’annulation des gels de postes afin de faire face à l’épuisement professionnel qui gagne tous les métiers, agents d’accueil et administratifs, techniciens, artistes. Si la santé physique et mentale des personnels  reste une priorité absolue, dans tous les domaines professionnels, elle est à l’évidence essentielle dans une structure créative ayant vocation au rayonnement international.

Dans l’attente de votre réponse,

Veuillez agréer, Monsieur le Préfet, nos salutations distinguées.

Bernard GENIN, le Président

Alerte à l’Opéra !

Courrier de Bernard Genin, Président du groupe, au Président de la Métropole le 12 avril 2017 -

Monsieur le Président,

Face à l’inquiétude et à la souffrance des salariés de l’Opéra national de Lyon, nous venons vous alerter sur leurs conditions de travail difficiles dues à un emploi du temps très irrégulier, d’où une surcharge de travail, et au non-respect de la Convention signée entre l’Opéra, l’État, la Ville de Lyon, la Région et la Métropole puisque la Direction fait appel au travail illégal en délocalisant la sous-traitance et l’activité. De plus, suite au conflit de novembre-décembre, un protocole a été signé mais il est toujours non respecté à ce jour. Sur les 400 personnes que l’Opéra emploie -250, Ville de Lyon ; 160, privé-, une vingtaine de postes de fonctionnaires étant gelés, le directeur a donc comme seuls recours la précarité et la multiplication de recrutements d’intermittents.

En outre, les délocalisations des décors (en Italie), des costumes (en Roumanie), du mobilier (en Chine, en Inde) et des accessoires -pour une qualité moindre et que les ateliers, de ce fait, doivent chaque fois reprendre, en partie ou entièrement- entraînent une démotivation des personnels, qui se sentent fort dépréciés. De plus, c’est pour 100 à 200 000 € qui ne sont pas faits à Vénissieux, et la Direction se défend chaque fois par le problème de la « coproduction ». Or, il ne s’agit pas de « coproduction » mais bien de délocalisation économique.

Dans ce contexte, Monsieur le Président, le désengagement de la Ville de Lyon et de la Métropole sur le projet de Préfabrique de l’Opéra n’est-t-il pas un frein à l’emploi sur l’agglomération ? Aujourd’hui, les représentants des salariés souhaitent un vrai dialogue social et annuler le gel de postes afin de faire face à l’épuisement professionnel qui gagne tous les métiers -des agents d’accueil et administratifs aux techniciens et artistes. En trois ans, 14 démissions et un licenciement ! 11 procédures de licenciement ont fait l’objet d’une procédure prud’homale ! Reconnaissance du travail, promotion interne, … sont essentiels pour un lieu de vie créatif qui se souhaite à rayonnement international.

Dans l’attente de votre réponse,

Veuillez agréer, Monsieur le Président, nos salutations distinguées.

Bernard GENIN, le Président

Nous ne nous satisfaisons pas des enveloppes proposées parce qu’elles sont à la baisse alors que les besoins, eux, ne cessent de grimper…

N° 2017-1875 + N° 2017-1876 - Fonds de solidarité pour le logement (FSL) et Actions favorisant l'accès et le maintien dans le logement -

Mme la Conseillère BURRICAND : Monsieur le Président, chers collègues, avec ces deux délibérations, nous sommes au cœur d’une préoccupation essentielle de nos concitoyens, celle du logement, plus précisément du mal-logement et même du « pas de logement du tout », de la cherté des loyers jusque dans le logement social et aussi de l’endettement des foyers qui accèdent à la propriété, sans compter les charges considérables liées à l’énergie et à l’absence d’isolation.

Nous devons aussi prendre en compte les difficultés de l’hébergement d’urgence et d’insertion, difficultés que les habitants des Communes de notre Métropole croisent quotidiennement : squats refuges, voitures dans lesquelles des familles entières passent la nuit et celles aussi qui cherchent un refuge dans les écoles, lieux symboliques de notre République mal en point, sans compter les familles qui vivent à dix dans des appartements prévus pour cinq.

Le FSL est un dispositif essentiel pour tous ceux-là.

Accéder à un logement décent, s’y maintenir est devenu un parcours du combattant pour des centaines de milliers de familles en France comme ici, sans compter la très grande atteinte à la dignité qu’est la privation d’énergie. Pourtant, le droit à un logement digne est inscrit dans la Déclaration universelle des Droits de l’Homme de 1948 comme dans notre Constitution mais il est battu en brèche par les politiques gouvernementales et européennes qui détruisent l’emploi, écrasent les revenus du travail avec les bas salaires et la précarité, préfèrent l’aide à la personne que l’aide à la pierre, favorisent la spéculation plutôt que le droit, sans compter la pression sur l’hébergement d’urgence avec ces millions de familles que la guerre et les destructions démocratiques autant qu’économiques obligent à quitter leur pays. La volonté d’hégémonie sur les ressources de la planète coûte très cher.

C’est pourquoi, monsieur le Président, nous ne nous satisfaisons pas des enveloppes proposées parce qu’elles sont à la baisse alors que les besoins, eux, ne cessent de grimper, qu’ils vont continuer à le faire et nous pensons que, sur ces questions centrales d’un point de vue social et solidaire, il y a besoin de sanctuariser les efforts nécessaires.

Car les chiffres sont bien au rouge : entre 2011 et 2015, les assignations pour impayés de loyers ont grimpé de 18 % dans le Rhône et les décisions d’expulsion de 17 % ; presque 15 000 familles vivent ce drame de l’expulsion chaque année. Les demandes de logements d’urgence se sont multipliées par deux dans le Département (de 4 000 à 8 000) et, concernant le DALO (Droit au logement opposable), une demande sur deux est repoussée. Nous avons tous fait l’expérience, cet hiver, de familles qui appellent le 115 sans parvenir à un résultat. La demande de logement social est elle aussi en augmentation avec 170 315 demandeurs en Rhône-Alpes ; il faudrait cinq ans pour écouler toutes les demandes dans notre Département.

La politique du logement creuse les inégalités : l’effort consacré au logement est de plus de 55 % des revenus pour le premier décile de revenus, de 31 % pour les trois déciles suivants, ce qui se traduit entre autres par une hausse des impayés de loyers dans le parc social de 6,5 % et les trois quarts des concitoyens de notre région n’atteignent pas le seuil de revenus permettant d’assumer un remboursement de 1 000 € en cas d’accession à la propriété.

Dans ces conditions de paupérisation, nous nous interrogeons sur la progression des PLS (Prêts locatifs sociaux) qui sont inaccessibles à une grande partie de la population. Nous nous interrogeons sur les 30 % supplémentaires de loyer pour les logements sociaux livrés depuis vingt ans par rapport au parc social ancien, ce qui aggrave la ghettoïsation et la rancœur puisque les habitants de ce parc ancien ne peuvent plus bouger, se sentent prisonniers, tandis que les plus pauvres se retrouvent toujours dans les mêmes lieux non pas parce qu’il y a trop de logement social ici ou là mais parce qu’il n’y en a pas assez mais surtout pas en constructions neuves et avec des loyers accessibles.

Pour prévenir les expulsions, nous demandons que des CCAPEX (Commissions de coordination des actions de prévention des expulsions) soient mises en place systématiquement et qu’aucune expulsion ne puisse être autorisée sans une proposition de relogement décente qui mobilise l’ensemble des acteurs sociaux et nous condamnons cette pratique moyenâgeuse de l’expulsion qui, avec ses frais, enrichit d’abord les huissiers au détriment des familles, des bailleurs sociaux et des fonds sociaux.

Concernant les logements d’urgence, nous souhaitons plus de transparence sur le fonctionnement de la Maison de la veille sociale et nous souhaitons qu’en ce qui concerne cette structure, un référent par Commune soit désigné et que les indicateurs de suivi de la MVS et du 115 soient partagés avec les Communes et l’ensemble des élus de la Métropole. Nous souhaitons plus de transparence et de travail avec les acteurs des Communes.

Nous nous abstiendrons sur cette délibération car elle n’est pas à la hauteur des besoins et nous souhaitons que la copie soit revue.

Volonté politique de résorber le mal-logement, vraiment ?

N° 2017-1916 - Lyon - Délégation des aides à la pierre 2015-2020 - Bilan 2016 - Avenant -

M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, l’état du mal-logement décrit dans le rapport annuel de la Fondation Abbé-Pierre devrait être la base de toute politique du logement, même si on peut discuter ensuite ses propositions. Je conseille donc à monsieur Girard, pour le changer de ses lubies anti-communistes, de se plonger dans la lecture de ce rapport. Il pourrait y vérifier tous les chiffres que j’utilise.

Je note d’ailleurs qu’à la présentation du rapport de la fondation Abbé Pierre, on peut lister les élus présents : Michel Le Faou est venu nous rejoindre -mais on va dire dans sa fonction de Vice-Président aussi- mais sinon, c’était les élus de ce côté de la salle ; je le précise, nous étions trois.

Nicolas Sarkozy était devenu Président dans une France qui construisait 450 000 logements par an. Il l’a laissée à 375 000 en 2012 et François Hollande la laissera à 338 400 en 2016. Les deux défendaient l’objectif de 500 000 logements. Ils ne l’ont pas fait.

Nicolas Sarkozy était devenu Président dans une France qui construisait 95 000 logements sociaux par an. Il l’a laissée à 100 000 en 2012 (un petit léger progrès) et François Hollande la laissera à 130 000 en 2016. Les deux affirmaient l’objectif de 150 000. Ils ne l’ont pas fait.

Il faut, de plus, tenir compte des logements qui sortent du parc… 12 000 à 20 000 par an par démolition, notamment dans la rénovation urbaine ; 10 à 20 000 pour être vendus. Résultat, le parc total ne progresse que de 70 à 80 000 par an ces dernières années. Résultat, sur les 500 000 attributions annuelles de logements, la plus grosse part concerne les mutations.

74 % des demandeurs -on n’a pas les mêmes chiffres, Béatrice- sont en dessous des plafonds PLAI. Or, il s’est construit moins de 30 000 PLAI en 2015, comme dans les deux mandats présidentiels précédents. Pire encore, 50 % du parc de logements PLAI -des logements les plus sociaux donc- ont pourtant des loyers supérieurs aux plafonds APL. Et c’est le cas de 82 % des PLUS. Ne parlons pas des PLS ! Il faut dire que les loyers, en général, augmentent plus vite que l’indice des prix, et pas qu’un peu puisque le loyer moyen a doublé entre 2000 et 2012. Le résultat est une catastrophe pour les locataires du privé dont le taux d’effort moyen dépasse 30 %, quand celui des accédants n’est que de 15 % et celui des propriétaires anciens d’un peu plus de 5 %. Mais ce taux d’effort a augmenté aussi pour les locataires du parc social.

En fait, le coût de la construction a presque doublé depuis 2000, passant de 80 000 € à 140 000 € par logement, la part de l’État s’effondrant de 4 000 € à 1 000 € par logement, contraignant les bailleurs à puiser dans leurs fonds propres et à s’endetter plus fortement. Vous pouvez constater qu’avec un financement total en baisse, le maintien de l’objectif de 4 000 logements implique de financer moins chaque logement.

Non seulement la multiplication des discours, des lois et des décrets n’a pas réduit le mal-logement mais tous les indicateurs se sont aggravés. Bien entendu, d’abord, parce que la pauvreté a progressé et, donc, la demande de logement social. Le rythme de construction n’a jamais atteint les promesses de 150 000 nécessaires. Le financement par l’État de l’aide à la pierre est à l’opposé des promesses : en forte baisse, quasi zéro en charge nette pour l’État, selon beaucoup d’études.

Non seulement le logement n’a pas été une priorité politique mais l’effort public en faveur du logement a diminué en poids dans le PIB (Produit intérieur brut), passant de 2 % en 2009 à 1,79 % en 2016, en sachant que, face aux 40 milliards d’euros de dépenses pour le logement, il y a 60 milliards d’euros de recettes. Les politiques réelles, loin des discours, ont continué à favoriser la rente foncière. Les dépenses de défiscalisation pour l’accession dépassent 2 milliards d’euros par an avec les dispositifs Duflot, Pinel et consorts tournés vers les couches aisées. La fiscalité du patrimoine immobilier, bien moins taxé que le patrimoine productif, aggrave une fracture entre couches sociales : les 50 % les plus aisés possédant 80 % du patrimoine et les revenus des successions ayant retrouvé pratiquement leur niveau du XIX° siècle. Vive la modernité !

Les aides sociales, pourtant en hausse, ne permettent pas de sortir les couches populaires de la paupérisation et les couches moyennes sont les perdantes, ne bénéficiant ni des aides sociales ni des aides fiscales et le discours promettant l’accession est un mensonge de plus. La part des propriétaires dans le premier quartile des revenus a fortement baissé depuis 1973, passant de 35 % à 15 %, alors que cette part augmentait fortement de 45 % à 65 % pour le quartile des plus aisés.

Alors, bien sûr, vous parlez, monsieur le Président, avec tant d’autres, de mixité sociale mais la société que vous défendez, « en marchant », est celle des inégalités structurelles et de l’incapacité des politiques publiques à les résorber. Les locataires du quart des plus bas revenus représentaient 12 % des locataires du parc social en 1973, avant le premier coup donné par Raymond Barre à l’aide à la pierre ; ils étaient 30 % en 1988, 40 % en 2006 et cela continue. Pourtant, les ménages prioritaires ont moins de chance d’obtenir un logement social que les autres. On veut nous faire croire que la cause serait dans les politiques d’attribution et, donc, qu’il faudrait renforcer les pouvoirs du Préfet ou de la Métropole mais la question centrale est celle du coût de la construction et, donc, d’une aide à la pierre massive et d’une politique foncière au niveau des besoins pour retrouver les loyers équivalents à ceux des constructions des années 70.

Bien sûr, nous voterons cette délibération qui permet de réaliser du logement social, insuffisamment et pas dans les conditions les meilleures, mais nous rappelons deux demandes fortes :

  • Respecter le choix des Communes et leur histoire. L’équilibre social, populaire, culturel d’une ville, ce n’est pas un seuil et les fractures identitaires, les incivilités, les divisions se développent tout autant chez les propriétaires que chez les locataires. La baisse de la part du logement social dans une ville populaire pourrait se traduire par le développement du mal-logement dans le privé, du logement indigne ;
  • Respecter le choix des habitants dans leur histoire territoriale. On peut choisir d’habiter Vénissieux parce qu’on s’y sent bien, pour la qualité de ses services publics, parce qu’on y connaît des amis, des relais ; ce qui doit nous guider, c’est la demande des habitants.

Nous voterons cette délibération, mais nous répétons qu’elle s’inscrit dans le cadre d’une absence de volonté politique de résorber le mal-logement.

Grand quartier d’affaires de la Métropole vs quartier plus agréable à vivre !

N° 2017-1913 à N° 2017-1915 - Lyon 3° - Opération Lyon Part-Dieu - Zone d'aménagement concerté (ZAC) Part-Dieu ouest -

M. le Conseiller GENIN : Monsieur le Président, vous nous permettrez de relayer ici un certain nombre de critiques et de réserves exposées notamment par le collectif Part-Dieu, collectif d’habitants du quartier et de salariés, qui notent des réflexions que nous partageons bien entendu.

Contrairement à la communication officielle et toutes les belles photos que nous avons vues -c’est vrai qu’à ce moment du projet, il y a toujours de très, très belles photos-, nous notons l’aggravation de la dimension du quartier d’affaires de la Part-Dieu au détriment d’un quartier plus agréable à vivre : « quartier tertiaire de référence en Europe » a dit tout à l’heure le Vice-Président, avec 350 000 mètres carrés de tertiaire supplémentaires et seulement -si on peut dire- 105 000 mètres carrés de logements. Même si nous n’opposons pas ces deux types de constructions, nous notons quelles sont les priorités données sur ce projet.

Faiblesse également des équipements publics pour les habitants et les salariés : trop peu sont prévus dans cette ZAC, en tout cas en nombre très nettement insuffisant. Réduction aussi importante des espaces verts en pleine terre et, là aussi, ce ne sont pas les belles images qui pourront rectifier le tir.

Des insuffisances également avec la création d’un seul quai en gare de la Part-Dieu alors que tous les spécialistes disent qu’à peine réalisé, il sera insuffisant pour absorber les nouveaux trafics, puisque la ZAC annonce l’arrivée de plus de 40 000 nouveaux salariés internes. Avec un plan de circulation trop incohérent -certains l’ont rappelé mais je le redis-, notamment la suppression du site propre dans un axe rue Pompidou en totale contradiction avec l’idée de développement des transports en commun. D’ailleurs, l’autorité environnementale estime que les impacts en termes de bruit et de qualité de l’air justifieraient des « efforts supplémentaires d’évitement et de réduction ».

En termes de concertation, là aussi, de nombreuses lacunes : même le commissaire-enquêteur de la modification n° 11 du PLU a dit le manque de sérieux de cette concertation.

Oui, nous partageons l’idée de moderniser le quartier de la Part-Dieu avec la participation et la réflexion des élus mais aussi de ses habitants et des salariés qui y travaillent. Mais, avec les trop nombreuses réserves -je n’en ai rappelé que quelques-unes tout à l’heure-, notre groupe ne pourra voter le soutien à un tel projet qui mériterait d’être revu pour l’améliorer et envisager des solutions alternatives en termes de circulation, d’espaces verts et d’équipements collectifs.

Monsieur le Président, la densification nécessaire aux enjeux d’avenir n’implique pas forcément la concentration. Répartir les constructions de tertiaire de façon plus équitable dans l’agglomération en les rendant plus harmonieuses et respectueuses du paysage urbain, en repensant les axes de transports en commun forts, en offrant des services diversifiés d’équipements publics est l’objectif qui devrait nous réunir ; nous pourrions ainsi marcher ensemble un bout, monsieur le Président, pas à Leipzig mais ici, à la Part-Dieu.

En conclusion, je dirai qu’il n’est pas impératif de bâtir l’hypercentre dans une vision dogmatique de la verticalité, avec cette vision de tours de plus en plus grandes, toujours pour maximiser le profit de quelques gros promoteurs et concentrer trop souvent dans un seul point. La vision que vous nous présentez de la Part-Dieu a tout d’un quartier essentiellement monofonction : le grand quartier d’affaires de la Métropole, sinon grand quartier d’affaires européen, tout à l’opposé d’un quartier plus agréable à vivre.

L’urbain doit appuyer et compléter l’humain dans ses aspirations et ses besoins ; il est encore temps d’aller dans ce sens.

En attendant, le groupe Communiste, Parti de gauche et républicain s’abstiendra sur ces délibérations.

La question de l’Opéra…

N° 2017-1882 - Équipements culturels et collectifs artistiques - Subventions - 2017 -

Mme la Conseillère BURRICAND : Monsieur le Président, chers collègues, nous voterons cette délibération consacrée aux subventions culturelles mais nous souhaitons nous attarder plus précisément sur la question de l’Opéra national de Lyon dont la délibération souligne le rôle essentiel, notamment parce qu’il représente le plus gros pourvoyeur d’emplois culturels de la Région Auvergne-Rhône-Alpes et aussi son rôle particulier dans la vie culturelle et artistique de notre agglomération.

Cela lui vaut de ne pâtir que de 3 % de baisse de subvention au lieu de 6 % pour les autres. Nous reconnaissons le rôle essentiel de l’Opéra national de Lyon et Vénissieux a pris toute sa place dans divers projets culturels permettant au plus grand nombre de découvrir l’Opéra, du concert traditionnel du 14 juillet aux Fêtes escales que notre population apprécie particulièrement. Vous savez combien nous avons regretté votre désengagement du projet Pré-fabrique Opéra à Vénissieux et combien nous sommes fiers d’accueillir dans notre ville les décors de l’Opéra.

Ce rôle particulier de l’Opéra de Lyon exige une exemplarité dont nous sommes, nous élus, les garants. La convention signée entre l’Opéra, Lyon, l’État, la Région et la Métropole décline largement les responsabilités sociales et culturelles, économiques et environnementales de cet outil historique. Elle insiste sur la nécessité de valoriser les métiers et savoir-faire artistiques et techniques, de valoriser le potentiel de connaissances et la transmission de savoir-faire liés aux métiers spécifiques ou rares de l’Opéra ou du spectacle vivant.

Autre axe largement développé par la convention, celui de la politique sociale de l’Opéra, visant à conjuguer la recherche de la performance et le « bien vivre au travail » concernant les salariés. Nous sommes pourtant interpellés depuis quelque temps par les salariés de l’Opéra sur ces deux questions : premièrement, sur leurs conditions de travail et, seconde question qui nous préoccupe beaucoup aussi, les délocalisations de décors et de costumes commandés et fabriqués à l’étranger pour des spectacles qui ne sont pas des coproductions internationales.

Nous souhaitons donc, monsieur le Président, des éléments précis sur ces deux questions et notre groupe s’adressera officiellement à vous dans les jours qui viennent.

Les déchets ne sont pas un mal !

N° 2017-1904 - Orientations stratégiques du Plan d'action économie circulaire, zéro gaspillage -

M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, permettez-moi tout d’abord de remercier Émeline Baume pour l’intitulé de cette délibération, pour la délibération aussi bien sûr, plus réaliste que l’appel à projets du Ministère. Car un territoire zéro déchet, c’est un territoire sans vie, tant la vie humaine, à commencer par la vie biologique, n’existe pas sans déchet ! D’ailleurs, la corrélation étroite entre mortalité infantile et assainissement public dans le monde montre l’impact de la gestion publique des déchets.

Je l’ai déjà dit dans notre Conseil, les déchets ne sont pas un mal. Il faut renverser l’échelle de valeur qui les fait considérer comme de l’ordure, mot négatif par essence, et les considérer au contraire comme une richesse, « un minerai urbain » disent certains. Le déchet, étymologiquement, c’est ce qu’on n’a pas utilisé d’une matière, pas parce que c’est sans valeur mais parce qu’on n’a pas su l’utiliser. Le bon slogan, c’est donc au contraire 100 % de déchets utiles !

Deuxième remarque, sur l’incinération : certes, la plus forte valorisation est d’abord de réduire le déchet à la source. C’est pourquoi les coûts de gestion des déchets doivent être financés par ceux qui les produisent, qui ont alors objectivement intérêt à les réduire. Ensuite, il faut favoriser la réutilisation, donc la réparation, puis la réutilisation des composants, la valorisation matière qui transforme par exemple des bouteilles de plastique en pulls. Mais l’incinération est aussi une valorisation et nous connaissons tous son importance pour assurer une réponse non carbonée et à très faible niveau de pollution pour le chauffage urbain. Donc oui à la formule « zéro gaspillage, 100 % de déchets utiles » !

Mais cette délibération ne concerne pas que les déchets, même si l’économie de la réutilisation, de la réparation et des filières de valorisation reste un défi à relever. Je rappelle que nous ne sommes pas arrivés à mettre en place une filière de valorisation des plastiques souples et pots de yaourt, malgré une expérience de deux ans à Villeurbanne.

Nous soutenons le développement d’une économie circulaire mais il y a plusieurs échelles de cercles dans cette économie : le très local, que permet par exemple le compostage de quartier ou l’atelier de réparation solidaire, le métropolitain mais aussi le plus global, avec ce qu’aurait permis par exemple le projet de Solvay de recyclage des terres rares dans les ampoules. Les anciens de la Vallée de la chimie décrivent une économie qui ne cesse de faire circuler les matières d’une activité à une autre. J’ai même entendu un chimiste parler d’une industrie incestueuse pour évoquer les échanges croisés multiples entre entreprises.

C’est pourquoi nous nous interrogeons sur le discours sur l’économie circulaire qui nous est présenté. Il faudrait sortir du modèle linéaire « produire, consommer, jeter », considéré comme un symbole du capitalisme alors que l’économie circulaire serait le symbole moderne d’une économie nouvelle.

Permettez-moi un peu d’histoire : en 105, le chinois Tsai Lun invente le principe de fabrication de papier à partir de vieux chiffons de lin. En 1031, le Japon commence la réutilisation des déchets de papier. La première usine de fabrication de papier recyclé ouvre en 1690 aux USA naissants. J’avais évoqué en janvier le recyclage, sujet à la mode au XIX° dans l’Angleterre victorienne de l’accumulation primitive. Et c’est le Préfet Eugène Poubelle, dont le décret de 1883 a rendu son nom célèbre, qui prévoyait -tout le monde l’a oublié- trois boîtes obligatoires : une pour les matières putrescibles, une pour les papiers et les chiffons et une dernière pour le verre, la faïence et les coquilles d’huîtres -ce devait être très parisien- car c’est ce qui permettait le recyclage.

En fait, si le capitalisme fait bien, dans un premier temps, des profits sur la consommation -c’est la marge commerciale- et sur la production -c’est le surtravail de Marx-, il ne nous avait pas attendus pour en faire aussi sur les déchets, tant il a toujours scruté toute ressource potentielle de profit. D’abord, en cherchant à augmenter les rendements physiques, donc réduire les pertes de matières. Un industriel de l’agroalimentaire est obnubilé par la valorisation matière ; dans une fromagerie industrielle, tout ce que contient le lait a été transformé, jusqu’à la récupération du nettoyage des machines, pour ne rejeter que de l’eau légèrement verdie. Dans ce cas, on est à 0 % de déchets. Ensuite, en cherchant aussi à valoriser les déchets quand le volume paraît justifier l’investissement pour les récupérer ; c’est ce que font depuis très longtemps les aciéries, par exemple, qui récupèrent des métaux dans la collecte de déchets métalliques et en font leur cuisine.

Bref, pour le système dominant, vive l’économie circulaire quand elle permet du profit ! C’est pourquoi, si nous partageons l’objectif d’expérimentations, nous serons attentifs à leur nature. Ce qui nous intéresse, c’est la meilleure utilisation globale des ressources, des matières et, pour cela, une réflexion sur cette écologie industrielle, qui est un oxymore pour certains et, pour nous, un renouvellement dans la planification des flux de biens et de services est nécessaire.

Nous attendons toujours des études sur la Vallée de la chimie, la réflexion d’ensemble sur les productions futures et leurs interactions ; il devait y avoir une analyse en 2017.

Les expériences devront prendre en compte les réalités sociales et notamment les inégalités, l’impact de la pauvreté et de la précarité sur les modes de consommation et d’accès aux services. On dit, par exemple, que le gaspillage alimentaire permettrait d’économiser 300 € par famille, sans faire de différence entre la consommation d’un foyer au RSA et d’un foyer qui dépasse dix SMIC de revenus ; on ne sait pas exactement où l’on est. De même, les études sur la tarification incitative et la redevance spéciale devront se faire en pour et en contre, identifiant les risques, les mésusages générés, les inégalités, les incivilités et leur contrôle.

M. LE PRÉSIDENT : Karl Marx a beaucoup écrit ; si vous faites tous les tomes, nous y sommes encore demain.

M. le Conseiller MILLET : Non, non… Enfin, nous demandons qu’une territorialisation des actions soit prise en compte et que les Communes puissent proposer des projets.

Je vous remercie.

M. LE PRÉSIDENT : Merci bien. Je vous inviterai un jour à rencontrer mon ami le Maire de Leipzig et il vous parlera du choc qu’a été la confrontation entre la production telle qu’elle était en Allemagne de l’est avant la chute du mur et la production occidentale. Cela a été un choc profond et il vous expliquera comment Leipzig, tout d’un coup, a été sinistré et comment aujourd’hui ils sont repartis de l’avant. Cela vous permettra peut-être de revisiter Karl Marx avec les temps contemporains.