M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, par cette délibération, nous voulons être un « territoire d’innovation de grande ambition » (ah, la créativité des ministères !) pour des projets en lien avec notre stratégie sur « l’industrie intégrée et reconnectée à son territoire et à ses habitants » (ah, la beauté des formules métropolitaines !).
L’industrie et l’emploi sont au cœur des préoccupations des Français. Depuis le raté de Lionel Jospin avouant qu’il n’y pouvait rien, tous les Gouvernements parlent de la relance de l’industrie. Sarkozy, Hollande, Montebourg, Macron, ont mis en place des plans pour l’industrie avec, toujours, comme principe la baisse « du coût du travail » pour des entreprises plus concurrentielles. Ils coûtent des milliards à l’État, donc aux Français, et quels sont leurs résultats ?
Selon le cabinet Trendeo,
- Bilan Sarkozy : 329 sites industriels nets perdus et 350 000 emplois industriels.
- Bilan Hollande : 278 sites industriels nets perdus et 100 000 emplois industriels.
Oui, mais il y a la reprise ! Permettez-moi de citer Michel Sapin qui s’en amusait dans les médias : « La croissance a été de 0,6 % au dernier trimestre, après 0,5 % au troisième -ce serait l’effet Macron-, mais elle était de 0,6 % au deuxième trimestre, après 0,5 % au premier ». Autrement dit, l’effet Macron est égal à l’effet Hollande. Ça promet !
D’ailleurs, le « speed dating » -médiatiquement réussi- du Président avec les grands patrons du monde a accouché d’une souris. 3,5 milliards à comparer aux 250 milliards d’investissements annuels des entreprises françaises, qui sont pourtant insuffisants, sachant que ces annonces sont presque toutes des projets qui étaient déjà lancés !
Et je ne peux résister au plaisir de vous citer cette déclaration du ministre Mounir Mahjoubi qui montre que, en terme de formules, la concurrence est vive : « La French Tech est un programme où l’on a fait des innovations très neuves mais qui pourraient être encore plus neuves en 2018 ».
Permettez-nous d’être méfiant de cette dimension marketing des discours de politiques économiques de vos amis de Droite et de Droite -je pense que c’est plus clair, finalement, que de dire de Gauche et de Droite- et, donc, de nous concentrer sur le concret.
Prenons le cas de l’annonce que vous avez faite d’un Campus industriel sur le site Bosch Vénissieux. Vous imaginez combien nous sommes partie prenante de cette ambition d’affirmer le rôle d’innovation industrielle de notre ville, fière d’être reconnue dans la stratégie économique de la Métropole. Mais, enfin, si nous voulons faire de l’industrie du futur sur ce site, il faudra des industriels et des investissements ! Boostheat est révélateur des besoins de financement pour passer de la R&D à la production sur un projet dont l’ambition est de moins de 100 emplois. Or, ce site a connu 1 000 emplois, il en faudrait donc 10 de cette taille !
Or, c’est le site du groupe leader européen de l’industrie 4.0. Comment imaginer que Bosch continue de se retirer du site ? Le groupe a annoncé qu’il vendait le foncier de la partie Bosch Diesel, et l’essentiel de la production Rexroth a été délocalisée. Tous ceux qui connaissent le site voient que, en tendance, Bosch se retire.
Une pétition adressée au Président du groupe Bosch est lancée à Vénissieux pour lui demander un investissement majeur sur ce site, dans le cadre de l’ambition d’en faire un site de référence de l’usine du futur. Nous vous demandons de la soutenir.
Mais, pour conclure, permettez-moi, monsieur le Président, de vous dire ce qui vous manque pour réussir votre ambition industrielle.
Il y a, dans la métropole de Lyon, une grande créativité économique et technologique, des passionnés de l’industrie et de l’innovation. Mais vous leur imposez cette concurrence libre et non faussée qui pousse à la spécialisation compétitive, à la destruction créatrice -toutes formules destinées à faire accepter que ce qui décide, en fin de compte, c’est le profit de quelques uns-. Or, vous pouvez toujours chercher à maîtriser le gros chat capitaliste pour des objectifs d’intérêt général, mais le gros matou -son vrai visage, chers collègues, c’est celui de Trump, de Draghi ou de Prokhorov-… c’est lui qui nous dit la vérité du capitalisme, sa cupidité, son indifférence à la culture autre que ce qui s’achète et se vend, sa violence et sa vulgarité…
C’est pourquoi, monsieur le Président, les objectifs affichés dans la candidature de la Métropole pour une industrie intégrée et reconnectée à son territoire et à ses habitants ne sont qu’un vœu pieux face au marché. Comment croire à l’objectif de « l’individu au cœur du système industriel » quand on connaît la logique implacable du capital !
Ce ne sont pas les idées des chercheurs, ingénieurs, entrepreneurs, industriels qui sont mauvaises, c’est le cadre dans lequel les actions seront conduites, avec le profit comme seul moteur, pour que les 0,1 % des plus riches continuent d’accaparer la plus grosse part possible du gâteau.
C’est pourquoi, monsieur le Président, je vais vous dire ce qui vous manque. Ce qui vous manque, c’est de travailler sous la direction d’un grand parti Communiste -un parti qui mette l’État réellement au service de l’intérêt général, qui combatte tous les Trump du marché pour imposer le respect des biens publics ; un parti qui domestique le chat capitaliste-.
Certes, en France, ce n’est pas pour demain mais si le Front National s’est refondé sur ses racines fascistes, à la surprise des commentateurs médiatiques qui ne comprennent rien à l’histoire, vous pourriez être surpris du prochain Congrès du parti Communiste !