M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, nous nous félicitons de ce projet de Pacte métropolitain qui marque le changement politique majeur de 2020 et qui peut se résumer en une phrase concernant la conception de l’institution : la Métropole se construit avec les Communes et non pas contre elles.
C’est une de ses ruses amusantes de l’histoire… Les promoteurs de la Métropole voulaient aller plus loin, absorber plus complètement les Communes… Rappelez-vous, il fallait simplifier le célèbre millefeuille, mais c’était difficile. Ils ont dû chercher un compromis, qui a donc ajouté une feuille supplémentaire : le territoire des Conférences des Maires.
Mais, si la Métropole est devenue une collectivité à statut particulier, les Communes sont toujours des collectivités de plein droit et la loi MAPTAM devait bien prévoir quelque chose pour organiser les relations entre ces deux niveaux de collectivité : c’est le Pacte de cohérence métropolitain. Les promoteurs de la Métropole pensaient que c’était l’outil pour poursuivre les transferts de compétences, et le pacte de 2015 poussait ainsi les Communes vers la Métropole sur vingt-quatre compétences articulées. L’expérience a tranché. Si tout le monde est ouvert à des mutualisations efficaces pour la maîtrise des dépenses publiques, les Communes restent le premier lieu démocratique et citoyen et plus personne ou presque n’imagine qu’elles deviennent un jour des arrondissements de la Métropole, qui serait devenue simplement Lyon, comme l’annonçait Gérard Collomb.
L’histoire a tranché. Aucune autre agglomération n’est candidate pour rejoindre le statut particulier de la Métropole de Lyon, et le Maire d’Oullins a même oublié qu’il avait souhaité que sa Commune devienne le dixième arrondissement de Lyon.
Le projet que nous a transmis la Conférence métropolitaine des Maires est ainsi très différent, dans sa forme comme dans son contenu, du pacte adopté en 2015.
Finies l’introduction provocante et la longue partie sur les « valeurs » de la Métropole comme si le pacte était un projet constituant d’une principauté au-dessus des lois de la République ! Je crois utile de rappeler ces débats pour les nombreux nouveaux élus qui ne les connaissent pas forcément.
Gérard Collomb, en 2015, affirmait sans honte, dans le pacte, que les métropoles sont une revanche des villes contre les États et contre la République ! Je le cite :
« La France, toute son histoire le montre, s’est largement construite sous la monarchie comme sous la République, sans les Villes voire contre les Villes. »
Je vous invite à relire cette introduction du pacte de 2015 révélatrice des conceptions antidémocratiques et antirépublicaines de ses auteurs.
Car ce n’est pas contre les « villes » mais contre les pouvoirs seigneuriaux que l’État, puis la République, se sont construits, en inventant justement les Communes comme base de la démocratie locale ! Et ce sont les États qui, seuls, construisent le cadre de toute souveraineté populaire, donc de toute démocratie réelle. C’est la République qui invente les droits imprescriptibles et inaliénables de l’homme, pas les potentats locaux des villes qui, elles, ont inventé les péages et les banlieues.
Si « l’armée des savetiers et des avocats » terrassa, à Valmy, l’armée professionnelle des rois européens s’exprima au cri de « Vive la Nation ! », ce mouvement universaliste était inscrit dans l’histoire séculaire de la construction nationale et communale ! Les Capétiens centralisateurs avaient unifié peu à peu le territoire contre l’Empire et l’émiettement féodal, en s’appuyant sur la langue française et sur les bourgeoisies urbaines et rurales pour tenir en laisse les grands féodaux et leurs appuis étrangers.
En 1214 à Bouvines, où Philippe Auguste affrontait l’Angleterre, l’Empire germanique, les Flandres et de grands féodaux « Français », c’est l’alliance du roi parisien et des milices communales bourgeoises qui sauveront la France capétienne aux cris de « Commune, Commune ! ».
C’est pourquoi les progressistes devraient reprendre Jeanne d’Arc aux fascistes, elle qui a favorisé l’émergence d’une guérilla de partisans contre l’occupant, quand c’est l’Église qui l’a envoyée au bûcher !
Oui, la Nation et les Communes se sont construites contre les guerres, les occupations et les seigneuries, et contre les églises. Voilà la leçon de l’histoire, que trahissait Gérard Collomb en 2015 !
Dès le 14 juillet 1789, après la prise de la Bastille, une « Commune de Paris » fut mise en place pour remplacer l’ancienne organisation de Paris datant du Moyen Âge. Pour protéger la ville de toute manœuvre contre-révolutionnaire, on créa une Garde municipale. Plusieurs autres villes suivirent rapidement cet exemple comme de nombreuses communautés.
Le 11 novembre 1789, l’Assemblée nationale constituante décrète qu’ « il y aura une municipalité dans chaque ville, bourg, paroisse ou communauté de campagne ».
Le 14 décembre 1789, la Constituante votait une loi créant les municipalités ou Communes, désignées comme la plus petite division administrative en France, à la place des cités, bourgades, communautés, paroisses, officialisant le mouvement d’autonomie communal révolutionnaire. Elle prévoyait déjà le non-cumul des mandats, limités dans le temps à deux mandats, et le droit d’initiative citoyenne, avec la réunion obligatoire de l’assemblée, sur demande de 150 citoyens actifs, dans les Communes de plus de 4 000 habitants !
Le 20 septembre 1792, le registre des naissances, des mariages et des décès -tenu par le curé de la paroisse- passa sous la responsabilité d’un officier public élu.
Le 14 octobre 1793, 10 brumaire de l’an II, le terme « Commune » fut imposé par un décret de la Convention nationale déclarant : « toutes les dénominations de ville, bourg ou village sont supprimées et celle de Commune leur est substituée ».
Et ce mouvement fut, dans toute l’histoire républicaine, révélateur avec, à chaque période réactionnaire, des restrictions mises à l’autonomie communale -Napoléon comme Vichy imposant la désignation des Maires-, alors que c’est la souffle révolutionnaire du mouvement ouvrier s’affirmant qui allait faire de la Commune de Paris un signal universel !
Oui, la Commune et la Nation se sont construites dans le même mouvement national de libération du peuple, et c’est la République qui leur a donné force de loi !
C’est pourquoi nous avons porté, dans la campagne métropolitaine, notre ambition d’une Métropole des Communes et des citoyens. Nous reviendrons sur la place des citoyens pour lesquels la Vice-Présidente Laurence Boffet est au travail, mais nous retenons de ce projet de pacte qu’il a été construit avec les Communes, à travers les Conférences territoriales des Maires, et qu’il a été adopté par la majorité métropolitaine des Maires, bien au-delà de la majorité politique du Conseil de Métropole.
Le cœur de ce pacte est le principe de projets territoriaux, élaborés par les Communes dans le cadre des politiques métropolitaines ; des projets territoriaux auxquels sont consacrés des moyens en hausse, prolongeant les budgets de proximité et d’initiative communale pour mobiliser 200 M€ sur le mandat.
Le projet affirme un principe totalement nouveau sur les relations entre Métropole et Commune en affirmant que : « L’information fluide et régulière des Conseils municipaux sur les projets et actions de la Métropole est primordiale. » Nous souhaitons renforcer ce principe en lui donnant un support plus concret. C’est le but de l’amendement que nous proposons et qui ouvre la possibilité, pour une Commune, de donner un avis sur une délibération la concernant, avis qui, bien entendu, ne peut être que consultatif mais qui serait la traduction, dans le processus délibératif, du lien fluide entre la Métropole et les Communes. Cela concerne les dossiers qui sont travaillés entre Métropole et Communes parce que les compétences sont croisées, donc qui concernent directement la Commune. Il ne s’agit pas d’ajouter un nouvel outil du débat politique du Conseil de Métropole, ce qui reviendrait à réduire les Communes à l’engagement politique de leur Maire, mais de donner une traduction concrète à la relation entre Métropole et Commune, en donnant à l’avis d’une Commune une vraie reconnaissance dans la décision de la Métropole.
Nous sommes donc satisfaits de ce projet de pacte et nous souhaitons qu’il soit complété, dans l’année, par une démarche de participation citoyenne, qui devra s’appuyer elle aussi sur les Communes et leurs outils de participation, dont les Conseils de quartier.
Permettez, monsieur le Président, de conclure avec une phrase complémentaire de ma collègue Christiane Charnay.
Mme la Conseillère CHARNAY : Monsieur le Président, je regrette que le Conseil municipal de Givors soit le seul à ne pas avoir donné un avis sur le Pacte de cohérence métropolitain.
J’avais interpellé, en date du 16 février, le Maire de Givors pour qu’il réunisse un Conseil municipal. Monsieur le Maire de Givors a fait le choix de ne pas le mettre en débat public.
C’est dommage ! Une occasion qui aurait permis de mieux faire connaître la Métropole, ses compétences et ses champs d’interventions aux citoyens de Givors.
AMENDEMENT – Présenté par le groupe COMMUNISTE ET RÉPUBLICAIN– Portant sur la page 12 (article 2.5. « Les Conseils municipaux »)
Cet amendement porte sur l’article 2.5 et fait suite à la phrase « L’information fluide et régulière des Conseils municipaux sur les projets et actions de la Métropole est primordiale. »
Il ajoute la phrase suivante :
« Elle peut conduire une ville à transmettre, par courrier de son Maire, un avis sur un projet de délibération métropolitaine ayant fait l’objet d’échanges entre la Métropole et la Commune. Cet avis doit être transmis un mois avant la séance du conseil où cette délibération est inscrite. Il est alors cité dans la délibération. »
Adopté par 106 voix pour et 31 voix contre.