Mme la Vice-Présidente PICARD : Monsieur le Président, mesdames, messieurs, avant de rentrer dans le vif du sujet de cette délibération, il faut rappeler les incertitudes qui pèsent sur la COMUE après le retrait de plusieurs universités. Un Conseil d’administration a dû être désigné par tirage au sort. Ce n’est pas le sujet de cette délibération, mais il faudra bien revenir sur nos relations avec cette Université de Lyon qui n’est pas encore faite.
La situation étudiante se dégrade ; les mots « pauvreté » et « précarité » lui sont désormais couramment associés : nous ne devons, en aucun cas, nous y résigner. Les psychologues, les professeurs, les associations ainsi que les syndicats alertent, depuis des mois, sur la souffrance étudiante qui s’est accentuée depuis le début de la crise sanitaire. Isolés dans des logements minuscules, sous une pression et un travail intenses, parfois en grande précarité financière, les étudiants et étudiantes sont à bout.
Dans une prise de conscience collective, la mobilisation s’organise -comme ces familles apportant spontanément des paniers garnis au pied des cités U ou les associations organisant des distributions alimentaires. L’État, les collectivités mettent en action des mesures d’urgence, chacun à son niveau. Sans m’éloigner du sujet, j’aimerais faire une parenthèse et rappeler que, si les étudiants vont aussi mal, la pandémie n’en est pas l’unique cause. Dans les universités, comme à l’hôpital, la crise sanitaire est révélatrice d’une situation de sous-investissement chronique, fragilisant tout le service public -dont celui de l’enseignement supérieur qui fonctionnait déjà en mode dégradé avant la crise. La question de la subsistance des étudiants est une bataille des syndicats et des organisations politiques de la jeunesse depuis des décennies. Une proposition de loi pour une véritable « rémunération étudiante » était déjà discutée à l’Assemblée nationale en 1950, portée par des Communistes et des Socialistes. Un projet, au croisement des solidarités salariales et de la démocratisation scolaire, issu des revendications syndicales portées notamment par l’UNEF (Union nationale des étudiants de France) et la CGT (Confédération générale du travail). Cette aspiration continue d’exister aujourd’hui dans les milieux étudiants.
Mais, dans l’immédiat, les bourses et les APL doivent être revalorisées, mais aussi étendues à davantage de bénéficiaires pour faire face aux conséquences de la crise sanitaire. Pour vivre, de nombreux étudiants doivent cumuler des petits contrats, dont ils sont aujourd’hui privés.
Dans la lutte contre la précarité des étudiants, la Métropole de Lyon agit, concrètement, sur plusieurs champs : l’inclusion numérique, l’insertion professionnelle, la santé psychologique et physique et l’aide alimentaire. Sur le logement, la Métropole demande l’application d’un principe de tolérance pour les retards de paiement des loyers. Il est rappelé l’existence d’un fonds de solidarité logement et un fonds exceptionnel complémentaire, pour les impayés de loyers et de charges, auxquels les étudiants sont éligibles.
Il me semble important de rappeler que la dignité et la santé sont des droits fondamentaux pour chaque être humain. Permettez-moi de revenir sur l’opération autour de la précarité menstruelle, que nous avons engagée à l’occasion de la Journée internationale des Droits des femmes, et qui prend tout son sens auprès des étudiantes, par le biais du bus info-santé-social de la Métropole. Il s’agit d’une équipe (une infirmière, une travailleuse sociale, une conseillère conjugale du plan Pauvreté et un chauffeur), qui se déplace sur les différents campus, pour informer la population étudiante sur les droits et les questions de santé, et pour distribuer des produits d’hygiène.
Une étudiante sur trois indique avoir des difficultés à acheter des protections hygiéniques. Près de deux millions de femmes, en France, vivent la précarité menstruelle. Pendant la période de leurs règles, elles sont exclues de toute vie sociale ou fabriquent des protections de fortune qu’elles utilisent avec les risques d’infection. Les règles, dans la vie d’une femme, ont un coût : environ 4 000 euros, pour l’achat des protections, mais qui peut s’élever jusqu’à 8 000 euros en moyenne, si on prend en compte tous les coûts induits (les médicaments antidouleur, les jours non travaillés, etc.).
La Métropole s’engage dans ce combat, au côté de l’association « Règles élémentaires », dans l’opération « Changer les règles ». Il s’agit d’abord d’une collecte de produits d’hygiène menstruelle mais, au-delà, c’est le sujet des règles dans son ensemble qu’il faut sortir du tabou. Parler du corps de la femme pose toujours un problème ! Et, pourtant, parler des règles, c’est juste parler d’une réalité physiologique vécue par 50 % de la population. C’est effectivement une spécificité de la femme d’avoir ses règles. En parler, c’est un pas supplémentaire pour qu’elle soit enfin acceptée dans sa globalité.
Il y a là un réel enjeu d’aller à la rencontre des plus jeunes, des collégiennes mais aussi, et surtout, des collégiens. C’est à cet âge que se jouent les questions de respect, d’interconnaissance de l’autre. En abordant ce sujet, nous participerons à la levée des tabous, des idées reçues et des préjugés. Cela permettra de parler, plus globalement, des différences entre les filles et les garçons, d’ouvrir la discussion sur le corps, la sexualité, etc.
Cette collecte métropolitaine va, je l’espère, rendre plus visible ce sujet pendant quelques mois sur notre territoire métropolitain. Elle a débuté ce 8 mars et se prolongera jusqu’au 28 mai, Journée mondiale de l’hygiène menstruelle. Quarante points de collecte sont installés et, pour une partie, dans les Maisons de la Métropole. Nous avons également fait appel aux Maires des 59 Communes pour leur proposer d’installer une boîte dans leur mairie. Un certain nombre ont répondu présents, et je veux ici les remercier.
Les dons seront redistribués, au fur et à mesure, aux associations du territoire, notamment à celles qui luttent contre la précarité -la Croix Rouge, les Restos du Cœur et d’autres- ainsi que des associations étudiantes comme GAELIS et, bien entendu, via le bus Info Santé.
En attendant la gratuité des protections pour les étudiantes annoncée par le Gouvernement, à partir de septembre prochain, l’opération « Changer les règles » permettra de pallier les besoins.
Je vous remercie.