Le 25 juillet dernier, une brillante start-up de la livraison à vélo de repas à domicile connaissait, comme depuis presque trois ans, une croissance de 30 % par mois et venait d’atteindre le million de livraisons. Le 26 juillet, la coquille vide Take Eat Easy, en cessation de paiement, était placée en redressement judiciaire et, magie de la Net économie et du néolibéralisme… sur les 2 500 coursiers payés à la tâche qui pédalaient pour la start-up, aucun n’a été licencié… Inutile, c’est la faillite personnelle qui guette ces auto-entrepreneurs !
D’aucuns l’avaient dénoncé, Take Eat Easy l’a démontré : le capitalisme de plateforme a reporté sur le travailleur « indépendant » le risque de fluctuation du marché dont la responsabilité, hier, incombait au patron.
Défini comme « travail-risque », ce type d’emploi est soumis au péril de ne pas pouvoir approcher la rémunération espérée, même en s’imposant des cadences infernales. La start-up défaillante a prouvé que le risque ne connaissait pas de limite… Certes, les investisseurs ont perdu des plumes mais ils ne sont pas plumés : le groupe allemand Rocket Internet, actionnaire de Take Eat Easy, l’est aussi de son concurrent Foodora. Reste à récupérer les clients de l’entreprise déficiente ! « Libres et indépendants », les galériens du pédalier sont déjà prêts à se remettre en selle, dirigés par l’algorithme envoyeur de notifications de l’ex-concurrent.
Emmanuel Macron nous l’avait dit : « Les jeunes veulent être entrepreneurs, pas fonctionnaires. » Ainsi va l’économie dite « collaborative ». Sa logique est démontrée. Son idéal déclaré de liberté se paie dès aujourd’hui d’une précarisation généralisée. Le monde des start-up, c’est la version souriante de la loi Travail.
Take Eat Easy est la première grimace.