M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, Nous espérons tous sortir enfin d’une crise sanitaire qui a marqué notre pays : par la pandémie et ses victimes, par les contraintes sanitaires pesant sur nos modes de vie, par les conséquences économiques et sociales que nous connaissons tous, dans le contexte d’une fracture politique profonde renforcée ce dimanche électoral et qui bouscule toutes les forces politiques.
Nous avons constaté avec stupeur, pour certains, que notre système de santé -classé, il y a encore vingt ans, comme le « meilleur du monde »- n’a pas été capable d’accueillir tous les malades, cela en dépit de la mobilisation et des efforts souvent héroïques des personnels soignants.
Cette crise a frappé avec force l’agglomération lyonnaise et mis en péril ses structures de santé révélant leurs faiblesses pour répondre à de telles situations d’urgence.
Nos hôpitaux ont été débordés ; les soignants, mis en grande difficulté. Nous avons manqué de lits, d’équipements, de matériels, de masques et de vaccins pendant longtemps.
La Métropole agit, dans le domaine de la santé, en partenariat avec de nombreux acteurs : les Hospices Civils de Lyon, la recherche médicale, la médecine de ville, les universités, la pharmacie. Cela concerne le 3ème âge avec les EHPAD, le handicap, l’enfance. Cette crise a impacté nos bailleurs sociaux, mis au premier plan les premiers de corvées de la collecte, révélé que l’analyse de nos eaux usées pouvait aider à suivre une épidémie.
Avec les Communes, nous avons dû organiser de nombreuses missions de crise pour aider dans le confinement, accompagner nos habitants, soutenir nos étudiants fragilisés par l’isolement et la perte de revenus, mettre à l’abri des personnes à la rue, fournir des masques, renforcer le Bus Info Santé, soutenir le commerce, la culture, jusqu’aux centres de vaccinations pour rendre réaliste l’ambition d’atteindre l’immunité collective, dont nous sommes encore loin d’ailleurs.
Nous sommes un partenaire incontournable du système de santé, notamment des hôpitaux où nous sommes représentés dans plusieurs Conseils d’administrations.
Nous sommes donc légitimes à nous interroger sur les raisons qui ont conduit à cette crise et pourquoi nous avons été collectivement mis en difficulté sur une mission publique de base : assurer la protection des populations contre une pandémie. Il faut notamment évaluer l’impact de très nombreuses fermetures d’établissements, de la perte de 100 000 lits en vingt ans, 17 600 depuis six ans et même en 2020 !
Dans son rapport publié en septembre 2019, le Conseil mondial de suivi de la préparation aux urgences sanitaires, mis en place par l’OMS en mai 2018, avait alerté sur le fait que le monde n’était pas prêt à faire face à une pandémie mondiale, telle que la grippe meurtrière de 1918, alors qu’en se basant sur les récurrences statistiques de l’apparition de souche virale virulente le risque de survenue d’une crise majeure était élevé.
Le risque de pandémie était clairement évoqué dans le Livre blanc fixant la stratégie française de défense et de sécurité nationale, présenté par le Président de la République en 2013 affirmant : « Le risque existe notamment d’une nouvelle pandémie hautement pathogène et à forte létalité résultant, par exemple, de l’émergence d’un nouveau virus franchissant la barrière des espèces ».
Bref, nous savions et, pourtant, nous n’avions pas les moyens et, notamment, les ressources humaines pour assurer la protection des populations et il a fallu l’incroyable mobilisation des soignants pour ne pas être submergés, alors même qu’ils nous alertaient en vain depuis des années sur leurs difficultés.
Bien entendu, il s’agit d’abord d’un débat national sur nos politiques de santé mais, parce que nous avons joué un rôle important dont les conséquences financières seront confirmées par le Compte administratif que nous aborderons dans cette séance, il s’agit aussi d’un débat qui concerne notre conseil et toute la métropole. Il y a certainement des décisions à prendre concernant nos politiques publiques qui ont une dimension de santé ou qui ont été mobilisées dans cette crise.
Pour cela, nous souhaitons réaliser de manière rigoureuse un état des lieux de ce qui s’est passé -de manière dépassionnée avec l’ensemble des acteurs-, retracer les processus de décisions, identifier les causes des dysfonctionnements et proposer, pour l’avenir, des améliorations, notamment concernant nos politiques mobilisées ou impactées par cette crise.
Quelles faiblesses de notre système hospitalier ont été révélées ou confirmées par cette crise ? Tout le monde alertait sur la situation du secteur psychiatrique et nous savons tous que la crise a encore amplifié ces enjeux. Cet état des lieux nous sera nécessaire dans les discussions sur l’avenir de nos EHPAD, de nos hôpitaux avec, bien sûr, l’actualité de Henry Gabrielle ou du Vinatier.
De même, la capacité à vacciner du territoire suppose sans doute des décisions partagées avec l’État.
C’est pourquoi nous demandons la création d’une mission d’information et d’évaluation, en application de l’article 96 de notre règlement intérieur, afin de connaître l’état du système de santé dans l’agglomération. Cette mission devrait entendre l’ensemble des acteurs de santé publique : l’ARS, les HCL, les organisations professionnelles et syndicales de la santé. Cet état des lieux n’aura pas à faire des propositions sur ce qui ne relève pas de nos compétences, mais à donner au débat public les éléments d’information utiles après cette crise et à nous permettre d’évaluer nos propres politiques publiques dans leur impact sur la santé.