Mme la Conseillère PICARD : Monsieur le Président, mesdames, messieurs, l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme dispose que toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires. Elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou, dans les autres cas, de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.
De même, le préambule de la Constitution de 1946 qui a, en France, une nature constitutionnelle, dispose que la Nation assure à l’individu, à la famille, les conditions nécessaires à leur développement.
En cohérence avec ces principes fondamentaux, répondre aux besoins des populations, voilà l’unique objectif que devrait poursuivre la politique nationale.
Il est indispensable d’avoir un logement pour pouvoir étudier, travailler, fonder une famille, être en bonne santé.
Tout comme lors du Conseil du 11 mai 2015 sur la délégation des compétences de l’État à la Métropole de Lyon pour la gestion des aides à la pierre, notre groupe dénonce ici encore une action publique inadaptée à l’urgence sociale. La baisse des aides à la pierre est un élément parlant de toute une politique gouvernementale qui met à mal le logement social. La baisse des aides à la pierre constitue une véritable irresponsabilité face aux 141 500 personnes vivant dans la rue et aux 31 000 enfants sans toit en France.
La crise du logement atteint une ampleur et une intensité inégalées depuis des décennies pour près de 15 millions de personnes, dont 3,8 millions vivant dans des conditions d’habitation précaires. La Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS) lance un cri de colère face à une insuffisance criante de places en hébergement d’urgence et l’impossibilité, pour les équipes du 115, de répondre à l’urgence, avec 71 % des demandes restées sans réponse en 2015 et un taux de non-attribution qui dépasse les 80 % dans le Rhône ; une aberration alors que le droit à l’hébergement d’urgence pour les sans-abris a été reconnu comme liberté fondamentale par le Conseil d’État en 2012.
La baisse des aides à la pierre est une incohérence face au nombre croissant de demandeurs DALO. Dans son rapport 2016, le comité de suivi DALO a constaté que de nombreuses décisions ne respectaient pas les critères de reconnaissance fixés par la loi ; ces décisions sont prises en fonction de l’offre de logements disponibles au détriment des situations des personnes. L’État se met hors la loi avec 31 foyers reconnus au titre du Droit au logement opposable (DALO) expulsés en toute illégalité en 2015, près de 60 000 ménages en attente de relogement, 25 000 condamnations depuis 2008 pour sa défaillance et une condamnation le 9 avril 2015 par la Cour européenne des droits de l’homme pour manquement à ses obligations.
Irresponsabilité et incohérence toujours, les menaces qui planent sur les Aides personnalisées au logement (APL), la remise en cause du 1 % logement réduit à 0,45 %, l’abandon de la garantie universelle locative, mesure phare de la loi ALUR qui devait prévenir efficacement les expulsions locatives et qui a été jugée trop coûteuse. Le coût, parlons-en ! Le coût des expulsions locatives, le coût de l’indignité, de l’inhumanité : 900 000 M€ et plus de 5 200 emplois équivalents-temps plein sont consacrés chaque année à la prévention mais surtout aux contentieux des expulsions. N’y a-t-il pas là des moyens de réinjecter, en amont, dans les aides à la pierre, par exemple ?
Derrière les chiffres, des hommes, des femmes, des familles en situation de détresse permanente, un quotidien fait d’humiliations et de doutes, de colère, de renoncement, de souffrance et de peur. Quand 8,5 millions de nos concitoyens vivent en dessous du seuil de pauvreté, les Communes, les CCAS, les associations ne sont pas en reste pour faire tout le travail social de prévention des expulsions. Et ce travail porte ses fruits puisqu’à Vénissieux, par exemple, les programmations d’expulsion ont baissé de 8 % en deux ans, grâce notamment au travail de fond réalisé par les services de la Ville, les bailleurs et les acteurs sociaux. Grâce à la création d’une Commission de coordination des actions de prévention des expulsions (CCAPEX) locale qui a permis de consolider cette logique de prévention, ce sont, l’an dernier, 88 situations qui ont pu être traitées avant le drame.
Le travail social est fait ! Mais le travail social ne peut être la seule réponse de la puissance publique ! Chaque année, les assignations en justice pour impayés de loyers ainsi que les demandes de recours à la force publique augmentent proportionnellement au développement de la pauvreté et, chaque année, à Vénissieux, le travail social redouble pour limiter les programmations d’expulsions. Or, nous avons besoin de solutions de relogement. Quelle réponse peut nous apporter la Métropole aujourd’hui pour reloger ces familles prises dans l’engrenage des expulsions ?
Pour les 47 000 demandeurs métropolitains de logements sociaux, nous devons apporter des réponses de partout : dans les Communes en dessous du seuil de SRU bien entendu mais aussi dans les villes qui atteignent le taux de 50 % de logement social, puisque le besoin est avéré. La construction des 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux, sur lesquels l’État s’était engagé ne doit pas rester un vœu pieux mais être accompagnée d’une véritable politique du logement au niveau national et amorcer le cercle vertueux : relance de la construction, bénéfice pour l’emploi, recul de la précarité et de la pauvreté.
Notre groupe souhaite rappeler que le candidat Hollande, en 2012, avait promis le doublement des aides à la pierre. Or, il les a divisées par deux. C’est pourquoi notre groupe s’abstiendra.
Je vous remercie.