Archives par mot-clé : Séance publique du 2 mai 2016

Une action publique encore inadaptée à l’urgence sociale !

N° 2016-1186 - Délégation des aides à la pierre 2015-2020 - Bilan 2015 -

Mme la Conseillère PICARD : Monsieur le Président, mesdames, messieurs, l’article 25 de la Déclaration universelle des droits de l’homme dispose que toute personne a droit à un niveau de vie suffisant pour assurer sa santé, son bien-être et ceux de sa famille, notamment pour l’alimentation, l’habillement, le logement, les soins médicaux ainsi que pour les services sociaux nécessaires. Elle a droit à la sécurité en cas de chômage, de maladie, d’invalidité, de veuvage, de vieillesse ou, dans les autres cas, de perte de ses moyens de subsistance par suite de circonstances indépendantes de sa volonté.

De même, le préambule de la Constitution de 1946 qui a, en France, une nature constitutionnelle, dispose que la Nation assure à l’individu, à la famille, les conditions nécessaires à leur développement.

En cohérence avec ces principes fondamentaux, répondre aux besoins des populations, voilà l’unique objectif que devrait poursuivre la politique nationale.

Il est indispensable d’avoir un logement pour pouvoir étudier, travailler, fonder une famille, être en bonne santé.

Tout comme lors du Conseil du 11 mai 2015 sur la délégation des compétences de l’État à la Métropole de Lyon pour la gestion des aides à la pierre, notre groupe dénonce ici encore une action publique inadaptée à l’urgence sociale. La baisse des aides à la pierre est un élément parlant de toute une politique gouvernementale qui met à mal le logement social. La baisse des aides à la pierre constitue une véritable irresponsabilité face aux 141 500 personnes vivant dans la rue et aux 31 000 enfants sans toit en France.

La crise du logement atteint une ampleur et une intensité inégalées depuis des décennies pour près de 15 millions de personnes, dont 3,8 millions vivant dans des conditions d’habitation précaires. La Fédération nationale des associations d’accueil et de réinsertion sociale (FNARS) lance un cri de colère face à une insuffisance criante de places en hébergement d’urgence et l’impossibilité, pour les équipes du 115, de répondre à l’urgence, avec 71 % des demandes restées sans réponse en 2015 et un taux de non-attribution qui dépasse les 80 % dans le Rhône ; une aberration alors que le droit à l’hébergement d’urgence pour les sans-abris a été reconnu comme liberté fondamentale par le Conseil d’État en 2012.

La baisse des aides à la pierre est une incohérence face au nombre croissant de demandeurs DALO. Dans son rapport 2016, le comité de suivi DALO a constaté que de nombreuses décisions ne respectaient pas les critères de reconnaissance fixés par la loi ; ces décisions sont prises en fonction de l’offre de logements disponibles au détriment des situations des personnes. L’État se met hors la loi avec 31 foyers reconnus au titre du Droit au logement opposable (DALO) expulsés en toute illégalité en 2015, près de 60 000 ménages en attente de relogement, 25 000 condamnations depuis 2008 pour sa défaillance et une condamnation le 9 avril 2015 par la Cour européenne des droits de l’homme pour manquement à ses obligations.

Irresponsabilité et incohérence toujours, les menaces qui planent sur les Aides personnalisées au logement (APL), la remise en cause du 1 % logement réduit à 0,45 %, l’abandon de la garantie universelle locative, mesure phare de la loi ALUR qui devait prévenir efficacement les expulsions locatives et qui a été jugée trop coûteuse. Le coût, parlons-en ! Le coût des expulsions locatives, le coût de l’indignité, de l’inhumanité : 900 000 M€ et plus de 5 200 emplois équivalents-temps plein sont consacrés chaque année à la prévention mais surtout aux contentieux des expulsions. N’y a-t-il pas là des moyens de réinjecter, en amont, dans les aides à la pierre, par exemple ?

Derrière les chiffres, des hommes, des femmes, des familles en situation de détresse permanente, un quotidien fait d’humiliations et de doutes, de colère, de renoncement, de souffrance et de peur. Quand 8,5 millions de nos concitoyens vivent en dessous du seuil de pauvreté, les Communes, les CCAS, les associations ne sont pas en reste pour faire tout le travail social de prévention des expulsions. Et ce travail porte ses fruits puisqu’à Vénissieux, par exemple, les programmations d’expulsion ont baissé de 8 % en deux ans, grâce notamment au travail de fond réalisé par les services de la Ville, les bailleurs et les acteurs sociaux. Grâce à la création d’une Commission de coordination des actions de prévention des expulsions (CCAPEX) locale qui a permis de consolider cette logique de prévention, ce sont, l’an dernier, 88 situations qui ont pu être traitées avant le drame.

Le travail social est fait ! Mais le travail social ne peut être la seule réponse de la puissance publique ! Chaque année, les assignations en justice pour impayés de loyers ainsi que les demandes de recours à la force publique augmentent proportionnellement au développement de la pauvreté et, chaque année, à Vénissieux, le travail social redouble pour limiter les programmations d’expulsions. Or, nous avons besoin de solutions de relogement. Quelle réponse peut nous apporter la Métropole aujourd’hui pour reloger ces familles prises dans l’engrenage des expulsions ?

Pour les 47 000 demandeurs métropolitains de logements sociaux, nous devons apporter des réponses de partout : dans les Communes en dessous du seuil de SRU bien entendu mais aussi dans les villes qui atteignent le taux de 50 % de logement social, puisque le besoin est avéré. La construction des 500 000 logements par an, dont 150 000 logements sociaux, sur lesquels l’État s’était engagé ne doit pas rester un vœu pieux mais être accompagnée d’une véritable politique du logement au niveau national et amorcer le cercle vertueux : relance de la construction, bénéfice pour l’emploi, recul de la précarité et de la pauvreté.

Notre groupe souhaite rappeler que le candidat Hollande, en 2012, avait promis le doublement des aides à la pierre. Or, il les a divisées par deux. C’est pourquoi notre groupe s’abstiendra.

Je vous remercie.

Pour une nouvelle étape dans le développement de l’usage du vélo en ville…

N° 2016-1148 - Plan d'actions pour les mobilités actives 2016-2020 - Délibération cadre -

M. le Conseiller BRAVO : Monsieur le Président, chers collègues, lors de la mise en place des Vélo’V à Lyon, on était sans doute loin de penser le succès engendré qu’est celui de l’usage du vélo en ville. Certes, beaucoup de villes européennes ont bien plus d’avance quant à la culture vélo et son usage, étant depuis bien plus longtemps que Lyon et son agglomération équipées de voies et services associés. Vélo’V n’a fait, en fin de compte, que révéler un besoin qui était sous-jacent. Il convient donc de poursuivre cet effort et d’envisager une nouvelle étape dans le développement de l’usage du vélo en ville.

Si nous partageons l’analyse qui est faite dans le rapport sur l’intérêt du vélo, il convient néanmoins de non seulement favoriser le changement des habitudes des usagers mais aussi celui des maîtres d’ouvrage : pouvons-nous continuer de nous contenter de peindre les voiries existantes sans plus de sécurité pour les vélocipédistes ? Amsterdam, Berlin, Copenhague et d’autres grandes cités préfèrent avoir des voies dédiées, matérialisées et sécurisées pour tous (piétons, cyclistes et automobilistes), avec une règle simple dans la réalisation et l’aménagement des voies de circulation : trottoirs, pistes cyclables, puis stationnement automobile et voies de circulation automobile. Souvent, le stationnement en double-file des voitures vient empiéter sur l’espace des vélos, les obligeant à des écarts dangereux.

Dans ces grandes villes, il existe aussi la possibilité de transporter son vélo dans des wagons spécialisés dans les tramways et les trains. Ne faudrait-il pas permettre demain le transport des vélos dans les tramways ? Ce qui facilitera la mobilité périurbaine et multimodale.

Une autre question est celle de l’extension du parc de Vélo’V aux agglomérations environnantes de la ville centre : pour quand est-ce prévu ?

Le vélo engendre des services multiples tels que les réparations et entretiens par le milieu associatif qui se développe aussi dans les villes de la première couronne ; il conviendrait de les soutenir elles aussi.

Enfin, si le développement du vélo et son déploiement est incontestable et que la révolution des habitudes d’usage est en route, il convient d’accompagner ce mouvement qui est bien souvent plus devancé par les usagers que par nos habitudes de gestion d’une agglomération.

Merci.

De trois à deux internats, sur le département et la métropole !

N° 2016-1188 - Protection de l'enfance - Internats expérimentaux -

Mme la Conseillère BURRICAND : Monsieur le Président, chers collègues, cette délibération nous renvoie d’abord à la courageuse mobilisation des personnels et familles de l’Internat Favre il y a un an. Or, s’ils n’ont pas réussi à empêcher la fermeture de cet outil original de soutien à la parentalité d’éducation, de scolarisation, nous pensons qu’avec leur bataille, ils ne sont pas pour rien dans le fait que ce lieu de l’Internat Favre reste dédié à l’enfance et à l’éducation.

Ce serait si simple, monsieur le Président, de considérer qu’avec l’ouverture de cet internat -pour l’instant sans nom si ce n’est celui de la rue dans laquelle il est-, vous êtes quitte du dossier de l’Internat Favre. Mais, justement, cette délibération nous dit que vous n’êtes pas tout à fait quitte car l’ouverture de Chazière n’efface pas la fermeture de Favre. Au contraire, elle éclaire votre décision : d’abord, parce qu’au total, nous passons, sur le département et la métropole, de trois à deux internats et que les places d’accueil de l’internat Favre ne sont pas récupérées : 36 places sont prévues à l’ouverture de Chazière, pour aller peut-être finalement à 48, 40 places fermes à Propières ; 60 places existaient à Favre, que nous ne retrouvons pas totalement, loin de là ! Dans le même temps, dans la délibération, si on nous dit qu’à l’internat Mauchamp, le financement est ramené à 25 places, ce que laisse entendre « ramener » c’est que, là aussi, il y a perte de places finalement. Au total, on arriverait donc -on a un peu du mal à faire le compte- à 48 places qui seraient perdues alors que les besoins dans ce domaine ne cessent de croître. Et ce manque aura des conséquences pour les enfants, les jeunes et les familles.

Donc, au final, vous avez bien désengagé la Ville de Lyon et refusé d’engager la Métropole dans le maintien de l’Internat Favre. Les salariés de l’Internat Favre ont vu les propositions s’accélérer à l’approche de cette séance et de cette délibération ; ils nous l’ont confirmé. Tant mieux ! Et nous espérons que cela ne sera pas démenti. Mais tout de même, quel gâchis humain et quel gâchis de savoir-faire !

Quant aux salariés de Propières, il faudrait pour qu’ils conservent leur emploi, qu’ils acceptent le temps et les dépenses correspondant à des déplacements considérables car Propières, ce n’est pas la porte à côté ! Là aussi, gâchis humain et gâchis de savoir-faire !

Enfin, la délibération fait état d’enfants faisant l’objet de mesures éducatives administratives ou judiciaires en milieu ouvert et c’est effectivement le rôle de la protection de l’enfance. Mais quid des parents et enfants qui sollicitaient volontairement une place à l’Internat Favre, justement pour éviter d’en arriver à ces mesures administratives ou judiciaires ?

Une chose est certaine, monsieur le Président, le compte des places prouve en tout cas que les projets défendus ici par notre groupe et d’autres groupes étaient fondés. Et c’est bien votre désengagement et celui de l’État, il faut le dire, qui a finalement conduit à en finir avec un outil pourtant vertueux et qui a entraîné la fermeture de l’Internat Favre que ne compense pas complètement aujourd’hui l’ouverture de Chazière, même si c’est tant mieux que cet établissement s’ouvre.

Notre groupe s’abstiendra donc sur cette délibération.

Démarche des Plans de prévention des risques technologiques (PPRT)… démarche importante…

N° 2016-1178 - Programme d'accompagnement, de prévention et de gestion des risques majeurs - Subventions - 2016 -

M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, permettez-moi de prendre un peu de recul à l’occasion de ces délibérations en disant quelques mots sur la notion de risques et des conceptions politiques qu’elle révèle.

L’évaluation d’un risque révèle toujours des attitudes différentes par rapport à l’avenir, fataliste, idéaliste, opportuniste et les assureurs en ont fait leur métier.

Malgré tant d’éruptions volcaniques depuis Pompéi ou de tsunamis, des hommes habitent des lieux dangereux. À la Faute sur Mer, tous connaissaient les risques, pas que le Maire, tous ceux qui voulaient leur maison dans un coin de paradis. Mais pourquoi je vous parle de risques naturels à propos de risques technologiques ?

Permettez-moi de rappeler un vieux débat entre Voltaire et Rousseau : Voltaire, fataliste, affirmait qu’il fallait accepter les catastrophes naturelles ; Rousseau, progressiste, lui répondait : « Un tremblement de terre dans le désert ne fait pas de morts, c’est la présence humaine qui le transforme en catastrophe ». Le risque est donc toujours social. Oui, Haïti en 2010 est un drame du sous-développement, d’un colonialisme destructeur, rien à voir avec une catastrophe naturelle.

Allons plus loin -je m’autorise une digression- : si le soleil accélérait sa transformation en naine rouge menaçant la terre, serait-ce définitif ? Non, le grand pédagogue, rêveur d’univers, Hubert Reeves évoque l’hypothèse de déplacer la terre ! Il envisage même, devant la mort entropique inéluctable de l’univers, de manipuler des trous noirs.

Je me suis éloigné un instant mais pour montrer que les risques ne sont pas dans les incroyables énergies des réalités physiques et naturelles mais dans la capacité ou non de l’humanité à s’organiser, évaluer, réduire, prévenir et réparer. Il n’y a pas de risques technologiques, il n’y a que des risques de société. L’évaluation d’un risque et des mesures préventives ou correctives réduisant son impact sont toujours des décisions politiques.

Après la première grande contamination radionucléaire artificielle de l’histoire humaine, Hiroshima, la ville détruite et contaminée, a été rendue habitable en quatre ans, avec de larges financements US qui réparaient moralement leur péché tout en ancrant le Japon dans l’alliance atlantique et, le cynisme triomphant n’ayant pas de limites, en étudiant de près les conséquences de leur acte, dont je rappelle qu’il était totalement inutile au plan militaire dans une guerre mondiale finissante.

L’anniversaire de l’accident de Tchernobyl est l’occasion de débats vifs suite à l’article de la revue Nature évoquant une augmentation de la biodiversité dans la zone d’exclusion. Mais ils révèlent aussi -et surtout, pour moi- l’impact de l’effondrement de l’URSS qui a suivi de près l’accident, de ces villages reconstruits laissés pour compte par la restauration capitaliste. Oui, la catastrophe est toujours sociale.

Noël Mamère, peu suspect de sympathie Communiste, disait d’ailleurs, après avoir dénoncé les risques nucléaires, que le plus important était le refus du modèle de société que suppose un modèle énergétique avec nucléaire. Nous n’avons pas le même projet de société mais voilà le vrai débat : non pas quelle société sans risques mais quelle société pour maîtriser les risques, quelle société tout court.

C’est pourquoi la démarche des Plans de prévention des risques technologiques (PPRT) est importante. Elle dit que nous pouvons maîtriser des risques majeurs si nous prenons les mesures nécessaires de réduction, de prévention, de protection. Nucléaire, chimie, pétrole, ce ne sont pas les techniques qu’il faut interroger mais les organisations qui s’en servent. Permettez-moi de prendre un exemple : ce n’est pas la gare de Sibelin ni la raffinerie qu’il faut mettre en cause mais bien l’organisation logistique entre elles, ce qui justifie notre réserve sur le PPRT de la Vallée de la chimie ; tout ce qui cache les logiques d’un système derrière le masque des risques dits naturels ou dits technologiques travaille en fait au profit du système.

Face aux risques, il y a le cynisme du capitalisme froid de l’assurance qui calcule ce qu’il peut faire payer pour couvrir ses clients et comment il doit se couvrir jusqu’à cet assureur en dernier ressort qu’est toujours l’État, c’est à dire la collectivité humaine ! Le capitalisme s’est toujours développé en reportant ainsi les risques sur les autres et le Socialisme réel a malheureusement joué trop souvent le mimétisme. Ce n’est pas un hasard si nous parlons de « plans de prévention », personne n’imaginerait parler de « marché de prévention », personne n’accepterait qu’on se limite à financer une assurance risque. Le plan -vous voyez le hasard, monsieur le Président, de l’ordre des délibérations, je réponds à votre dernier commentaire-, c’est-à-dire la décision politique d’orienter les ressources en fonction de l’intérêt général est l’outil de la maîtrise des risques et donc, plus généralement, de la maîtrise publique d’une société humaine complexe.

Cette démarche des PPRT nous montre qu’une autre voie de développement est possible, donnant au politique le rôle décisif pour orienter et contrôler le marché, et sortir enfin de cette préhistoire humaine qu’est le capitalisme.

Je vous remercie.

Le travail, la création et l’entreprise sont pleinement partie prenante de la société…

N° 2016-1155 à N° 2016-1157 - Lyon_Ville de l'Entrepreneuriat (L_VE) - Subventions - 2016 -

Mme la Conseillère BURRICAND : Monsieur le Président, chers collègues, nous voterons ces trois délibérations car nous soutenons tout ce qui peut contribuer à créer de l’activité économique et de l’emploi mais nous mesurons bien sûr en même temps les limites de ce qui est décrit ici et qui ne contrebalancera ni les délocalisations, ni les fermetures d’entreprises, ni les licenciements des grands groupes industriels, les suppressions de postes dans les services publics, aux Hospices civils de Lyon (HCL), y compris dans les Communes, suite aux baisses de dotations.

Faut-il en faire la liste ? Véninov, par exemple, qui a supprimé 87 emplois en 2011 ; le repreneur Windhager n’a jamais recréé les 60 à 80 emplois annoncés et envisage la fermeture de la toute petite ligne de production qui subsiste. On pourrait parler de Bosch France, presque 1 000 emplois supprimés depuis 2008, malgré un bénéfice du groupe avoisinant les 5 milliards en 2015 et le risque d’une délocalisation en Turquie pour 2017, avec la fermeture de la dernière ligne de fabrication de moteurs diesels. Sur le même site, plus de 150 emplois menacés à Bosch Rexroth, 40 à Sillia sur les panneaux solaires. Ce n’est pas étonnant que les salariés de ce site industriel, regroupant trois grandes entreprises aujourd’hui menacées de disparition, soient largement mobilisés et dans la rue pour protester contre la loi El Khomri.

Bosch a été une des premières entreprises à imposer de travailler plus pour gagner moins au nom de l’emploi. Chacun peut mesurer aujourd’hui le résultat de ce type de mesure que monsieur Macron et madame El Khomri veulent aggraver jusqu’à remettre en cause totalement un Code du travail, sur lequel pesaient fortement les conquêtes sociales du CNR et de mai 1968.

Décidément, nous sommes toujours bien confrontés à ce vieux paradoxe : c’est bien le patronat, ceux qui s’enrichissent le plus sur le travail, ce sont bien ceux-là qui défendent le moins l’emploi, le détruisent si nécessaire au regard de leurs objectifs de profit ; et tant pis pour le coût social et humain de telles mesures !

Quant à l’emploi public, il faut tout de même rappeler, par exemple, que la fermeture programmée de l’hôpital Charial et le transfert des services concernés équivaudra, pour les HCL, à la suppression de 15 emplois temps plein, que de très nombreux collègues aujourd’hui n’obtiennent jamais les remplacements nécessaires d’enseignants faute de recrutements suffisants, notamment en Titulaires sur zone de remplacement (TZR), professeurs remplaçants, et que le manque d’enseignants dans certaines disciplines, notamment en langues, remet en cause complètement la mise en œuvre de la réforme des collèges. Et j’ai parlé des problèmes des Communes.

Nous n’entamerons donc pas l’air « des Trompettes de la renommée » devant ces délibérations. Mais si ces subventions à diverses associations et dispositifs donnent une chance à des femmes et des hommes de réaliser leurs projets, de créer des emplois supplémentaires, nous n’allons sûrement pas les bouder, surtout quand ils visent les femmes, premières touchées par le chômage et les bas salaires ou des populations qui viennent de quartiers en Contrat urbain de cohésion sociale (CUCS) pour qui l’accès à l’emploi est particulièrement difficile.

Voyez, monsieur le Président, nous, élus Communistes, nous pensons que le travail, la création et l’entreprise sont pleinement partie prenante de la société. C’est pour cela, d’ailleurs, que nous refusons que les actionnaires y soient les seuls décideurs. Nous avons d’ailleurs initié, à Vénissieux, une charte signée par 25 des principales entreprises de la ville, avec l’objectif notamment de multiplier les passerelles entre les jeunes de nos quartiers et les entreprises. Nous nous battons pour obtenir des engagements sur l’insertion et l’emploi des entreprises qui s’installent sur la ville.

C’est pourquoi je profite de cette intervention pour vous dire combien nous avons trouvé votre attitude peu républicaine, sur la Commission locale d’insertion (CLI) 9. Votre obstination à ne pas en confier la présidence à un élu Vénissian de la majorité municipale conduite par Michèle Picard relève du non-sens quand on sait que, sur cette CLI, près de 70 % des bénéficiaires sont Vénissians. Vous avez mis un an pour arriver à exclure les Conseillers métropolitains de cette CLI, allant jusqu’à modifier, par arrêté, le règlement des CLI pour pouvoir nommer un Président du collège « entreprises » comme Président. Vous avez désigné le Directeur de l’unité territoriale et non pas un Conseiller métropolitain comme représentant de la Métropole, créant ainsi une situation d’exception pour cette CLI et vous lui avez confié la présidence de l’instance de médiation car nous imaginons bien que cela n’intéressait guère votre Président, monsieur José Félix du groupe ALDES. Il n’y aura donc pas d’élu métropolitain dans cette instance. Seuls les représentants des deux Maires en tant que Présidents des Centres communaux d’action sociale (CCAS) y siègeront. Il n’y a pas de quoi être fier, monsieur le Président, d’autant que vous avez ainsi ouvert, quasi clandestinement, un précédent qui pourra s’appliquer à d’autres CLI.

C’est un climat tendu de ces instances, notamment sur ce territoire où le chômage et l’exclusion font des ravages. Nous espérons surtout que vous ne serez pas amené un jour à regretter de vous être ainsi privé de la légitimité des élus dans ces instances.

M. LE PRÉSIDENT : Merci beaucoup. Monsieur Kimelfeld, quelques mots.

M. le Vice-Président KIMELFELD : Quelques mots très rapides pour donner quelques éléments à madame Burricand : pour lui dire d’abord que je viens d’écrire à madame le Maire de Vénissieux pour repréciser le fonctionnement de la Commission locale d’insertion (CLI) plénière et de la CLI qui traite des cas individuels et je voudrais repréciser que, oui bien sûr, c’est un dirigeant d’entreprise -vous l’avez dit- qui préside à la CLI plénière. En aucun cas, il n’intervient sur les cas individuels. Je crois qu’il faut bien le préciser ici pour ne pas tomber dans la caricature. Il faut rajouter aussi que, bien sûr, les élus de Vénissieux, comme les élus de la CLI, sont invités à la CLI plénière notamment.

Je voudrais simplement dire aussi qu’en matière d’insertion, on ne peut pas fonctionner par soustraction mais plutôt par addition de compétences ; c’est l’ambition que nous avons sur cette CLI et nous l’avons sur les autres en invitant le monde économique.

Je crois, madame Burricand, que si on veut demander des efforts aux entreprises en matière d’insertion, il faut éviter que l’on tombe trop vite dans la caricature des entreprises. Puis, au passage, Lyon_Ville de l’entrepreneuriat accompagne la création d’entreprises, donc quelque part accompagne les créateurs et moi, ce que je souhaite aux créateurs d’entreprises c’est qu’ils deviennent de grands patrons à la tête de grandes entreprises avec beaucoup d’emplois.

Je vous remercie.

M. LE PRÉSIDENT : Merci. Quelques mots simplement pour dire à madame Burricand que je partage partiellement son analyse, tout du moins le début, à savoir que oui, une société c’est compliqué, que les entreprises ne sont pas là pour toujours, qu’il faut donc toujours en créer des nouvelles sous peine d’avoir des difficultés.

C’est pour cela que nous avons mis en place ce dispositif comme Lyon_Ville de l’entrepreneuriat qui nous permet de créer quatre à cinq fois plus d’entreprises que ce que nous faisions il y a une dizaine d’années. C’est pour cela que l’Association pour le développement économique de la région lyonnaise (ADERLY) prospecte à l’étranger pour essayer de faire venir à Lyon un certain nombre d’entreprises dans notre Métropole. Vous voyez, c’est compliqué, déjà pour un certain nombre d’entreprises, de grandes entreprises françaises : par exemple je discutais avec des chefs d’entreprises il y a quelque temps, ils me disaient : « Vous voyez, sur la France, c’est à peu près 8 à 9 % de nos parts de marché ; sur l’Europe, c’est 20 % de nos parts de marché. » et, donc, il faut essayer de faire en sorte qu’il y ait un attachement fort avec un territoire, que l’on peut faire uniquement par le fait de développer une université, de la recherche, de la formation qui soit d’excellence et donc qu’ils aient un intérêt à pouvoir rester dans notre territoire et c’est ce que nous faisons.

Je crois que nous ne le réalisons pas si mal parce que je ne sais pas si vous avez lu la dernière enquête de l’INSEE ; je vous donnerai les références et vous verrez que les deux tiers des emplois créés dans la région Auvergne-Rhône-Alpes au cours des six derniers mois l’ont été dans la Métropole de Lyon. Ce n’est pas si mal et c’est peut-être parce que nous donnons une certaine image de la Métropole.

Vous voyez, évidemment, c’est mieux si on apparaît un peu tournés vers ces complémentarités entre l’université, la recherche et l’entreprise pour attirer des entreprises, en particulier des entreprises étrangères, que si vous voyez des choses sur les écrans de télévision, où ça brûle partout ; on va dire que c’est plus attractif pour les entreprises étrangères et, donc, c’est pour cela que nous essayons de mener la politique que nous menons dans cette agglomération.

Mme la Conseillère PICARD : C’est pour ça qu’on vous demande une université à Vénissieux !

Pour un vrai bilan des pôles de compétitivité en terme d’emploi, et notamment d’emploi industriel !

N° 2016-1158 + N° 2016-1159 - Pôles de compétitivité - Subventions -

M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président, chers collègues, ça tombe bien, la pédagogie est l’art de la répétition, je vais donc pouvoir répéter ce que vous n’avez pas entendu dans l’intervention de madame Burricand. En tout cas, pas la peine d’une intervention longue pour expliquer qu’il est devenu impossible de voter toute délibération sur ces pôles de compétitivité qui multiplient les financements publics pour des groupes qui détruisent toujours plus d’emplois.

Vous nous direz que la courbe du chômage est en train de s’inverser, même si vous savez bien que les chiffres surprenants du chômage, les derniers, traduisent surtout une explosion pas du tout surprenante des radiations. Mais comme ce qui nous intéresse n’est pas de savoir si François Hollande pourra ou non se représenter en 2017, nous répétons ce que des milliers de salariés voient partout en France, et dans la région Rhône-Alpes et dans l’agglomération lyonnaise, et que des dizaines de militants d’entreprises ont partagé samedi lors des rencontres Communistes de Vénissieux sur ce sujet : l’emploi industriel continue à reculer et, avec lui, la création de richesses qui permet le développement réel des emplois de services et non pas de ces jobs, stages, domestiques et autres sous-emplois à la Uber.

Le délégué syndical de Peugeot nous disait qu’au-delà des 3 000 emplois perdus du site fermé d’Aulnay en 2013, qui ont fait la une des médias, ce sont 17 000 emplois qui ont été supprimés dans ce groupe en France. Le délégué syndical d’Alstom Énergie, devenue General Electric, vous donne les nouvelles du plan de 1 500 suppressions d’emplois en France, pour ce groupe dont nous finançons massivement le projet à Villeurbanne. Les grévistes de Bosch dénoncent les milliers d’emplois perdus et occupent le site de Vénissieux ; sans doute n’avez-vous pas eu le temps de rencontrer le Président de Bosch pour le convaincre de l’attachement au territoire. Pour info, ils étaient attendus ce matin par des vigiles et des huissiers, montrant à quel point le dialogue social à l’allemande a les mêmes limites que le dialogue social à la française.

J’arrête là pour ne pas être long mais voilà la vérité de cette « économie de la connaissance la plus compétitive et la plus dynamique du monde, capable d’une croissance économique durable accompagnée d’une amélioration quantitative et qualitative de l’emploi et d’une plus grande cohésion sociale ». Vous aurez reconnu le discours européen de Lisbonne qui est à la base de cette démarche des pôles de compétitivité.

Nous avions déjà demandé, avec d’autres, un vrai bilan de ces pôles en terme d’emploi, et notamment d’emploi industriel. Et je suis désolé pour notre ami Max Vincent mais je voudrais bien qu’il nous donne les chiffres de l’emploi industriel à Lyon ; dans l’agglomération lyonnaise, c’est une chose mais à Lyon, ce serait assez rigolo. Pour ceux qui connaissent le troisième et le huitième, il est devenu évident que ce n’est pas leur objectif et qu’ils servent bien d’autres intérêts.

Nous ne sommes pas opposés, bien sûr, aux projets eux-mêmes et donc notre groupe s’abstiendra sur ces délibérations.

M. LE PRÉSIDENT : Merci bien. Encore quelques mots parce qu’effectivement, vous avez raison, la politique, c’est l’art de la pédagogie. C’était Lénine qui disait : « La politique c’est trois choses : expliquer, expliquer et expliquer ». Donc, j’explique.

Donc, si j’ai à expliquer, je vous dirais que l’on a essayé, dans un certain nombre de pays à travers le monde, de créer une économie totalement administrée et apparemment cela n’a pas très bien marché. Si l’Union soviétique s’est effondrée à un moment donné, c’est parce que l’on avait un modèle d’économie administrée et cela a été l’effondrement. Vous comprenez, nous sommes comme vous des réalistes, nous ne voulons pas reprendre des modèles qui se sont effondrés. Donc nous essayons ici, modestement, dans notre agglomération, de développer des modèles un peu nouveaux et qui nous permettent de développer l’emploi. Vous avez raison sur un point, c’est qu’en France, au cours des dix, quinze dernières années, on a laissé tomber l’emploi industriel parce qu’il y avait à un moment donné une thématique qui était que, finalement, il suffisait de se développer sur les services et que, c’était fondamental, on pouvait laisser l’emploi industriel aux autres. Quand on regarde aujourd’hui ce que sont les services dans l’agglomération lyonnaise, pour deux tiers ce sont des services à l’industrie. Donc il faut bien qu’il y ait un peu d’activité industrielle pour pouvoir continuer à développer les services aux industries.

Nous avons continué à avoir une base économique relativement importante. Relativement importante, vous le savez, je vous le répète chaque jour, sur les sciences du vivant, relativement importante sur les cleantechs, relativement importante sur le numérique, notamment appliqué par la Ville et c’est parce que nous avons cette base-là qu’aujourd’hui, notre tertiaire se développe. Excusez-moi du peu mais dans les récents classements -et je vous invite à aller voir « Why invest in Lyon ? », vous verrez le classement qui a été fait des villes européennes sur le tertiaire placé par Ernst & Young, en dehors de Londres et Paris-, nous sommes aujourd’hui classés septième ville en Europe, nous étions vingt-cinquième il y a une vingtaine d’années !

Voilà c’est cela le modèle. Et comme vous êtes quelqu’un qui aime l’économie, je m’étonne que vous n’adhériez pas encore au modèle lyonnais. Mais je ne désespère pas, un jour, de vous en convaincre.