M. le Conseiller MILLET : Monsieur le Président et chers collègues, un commentaire de portée nationale et un de portée locale. Cette délibération s’inscrit dans le débat public sur la fiscalité directe et indirecte des entreprises et des ménages, dans sa dimension aussi locale dans les rapports entre Communes et Métropole.
Malheureusement, la tendance déjà ancienne à la baisse de la fiscalité des entreprises compensée par une hausse de la fiscalité, notamment indirecte des ménages, est inscrite dans tous les programmes présidentiels, en tout cas de ceux que les médias présentent comme pouvant être élus. Mais, pour parler de fiscalité des entreprises, il faut poser le décor : jusqu’aux années 1980, les revenus distribués des entreprises non financières ne représentaient que 5 à 6 % de la Valeur ajoutée pendant que l’investissement baissait progressivement de presque 30 % en 1949 à 25 % dans les années 1960, puis de moins de 20 % depuis les années 1970 ; et depuis, ils n’ont jamais remonté.
Par contre, les revenus distribués qui baissaient légèrement jusqu’en 1977 ont, depuis, constamment augmenté jusqu’à atteindre près de 25 % en 2008 et, depuis, toujours plus de 20 % malgré la crise. Il est vrai que les entreprises sont aussi bénéficiaires de ces dividendes mais le solde net dépasse 8 % depuis 2010, ce qui représente une rente annuelle de 40 milliards extraite des richesses créées par le travail. Si le SMIC horaire avait suivi la même progression que les revenus distribués, il s’approcherait des 15 € de l’heure.
Et pourtant, on nous répète chaque jour à quel point les entreprises sont surchargées de contraintes, l’urgence de toujours est toujours de baisser le coût du travail, augmenter sa flexibilité, mettre en cause tout contrat de travail protecteur, etc., baisser leurs charges et leurs impôts. On le fait depuis trente ans avec les résultats que tout le monde connaît, mais on continue.
Alors, cette CFE n’est qu’une petite partie du sujet mais nous considérons qu’il y a une vraie marge pour augmenter cette fiscalité et faire ainsi mieux contribuer les entreprises qui bénéficient des politiques publiques du transport, du logement, de l’éducation, de la culture.
La remarque locale concerne la répartition de la fiscalité entre Métropole et Communes. Car la création de la TPU -dont faisait état Jean-Paul Bret tout à l’heure- en 2003, réorganisée depuis avec notamment cette CFE, a privé les Communes de tout effet de leur propre dynamique. On le voit bien dans cette délibération qui évoque une augmentation des bases de près de 2 %, dont il serait intéressant de calculer la croissance cumulée depuis 2002. On peut s’en rendre compte en regardant l’attribution de compensation versée aux Communes qui représentait 200 M€ en 2003, soit 20 % du budget de fonctionnement à l’époque. En 2017, elle représente 213 M€. C’est normal, elle est figée -je ne sais pas pourquoi elle est passée de 200 à 213 M€, peu importe-, mais elle représente désormais + 10 % du budget. On peut donc estimer que la moitié des ressources de la fiscalité entreprises communale d’avant 2003 est désormais dans le budget métropolitain, la Dotation de solidarité communautaire, qui ne représente que 10 % de l’attribution, ne pouvant évidemment pas la compenser. En gros, on parle de 200 M€ annuels, monsieur le Président.
Voilà pourquoi nous nous abstiendrons sur cette délibération.
M. LE PRÉSIDENT : Merci bien. J’éviterai de revenir sur le débat politique. Je vous citerai simplement trois chiffres. Le taux de marge des entreprises, il y a deux ans en France, est de 28 %, la moyenne en Europe est de 38 %, en Allemagne de 40 %. On comprend qu’il puisse y avoir quelques petites difficultés dans notre pays.