Mme la Conseillère ARTHAUD : Monsieur le Président, Madame la Vice-Présidente, chers collègues, depuis deux ans, l’eau publique de la métropole de Lyon n’est plus gérée par délégation à un grand groupe privé, mais directement par une régie publique, donc sans actionnaires, sans dividendes et sans intérêt privé pesant sur les décisions d’investissements, d’entretien, … C’est une belle aventure qui doit permettre de faire de l’eau une question citoyenne, dans un contexte où elle devient un enjeu environnemental et social vital, entre sécheresse et inondations…
De nombreux projets sont lancés pour répondre à ce défi de l’eau publique, dont la nouvelle tarification de l’eau. La régie de l’eau propose à la Métropole de définir un tarif différencié selon l’usage de l’eau et selon le volume. Il y aurait un tarif pour les particuliers et un tarif pour les professionnels, et les deux tarifs seront définis avec des seuils et des prix différents selon la consommation.
Les élus communistes affirment le droit à l’eau, l’eau vitale mais aussi l’eau de loisir, notamment avec l’adaptation au changement climatique…
Il faut bien sûr éviter tous les gâchis, mais aussi se dire : « Non ! l’eau n’est pas rare ». La quantité d’eau sur terre est constante. Il y a, sur ce point, deux sujets :
– Elle est inégalement répartie, depuis toujours, mais, avec le climat, ces inégalités s’aggravent entre nord et sud en France, et aussi avec la météo alternant sécheresses et inondations. Cela veut dire qu’il faut investir plus pour réguler les usages, stocker pour pouvoir redistribuer, donc aménager les cours d’eau. La priorité est la transformation du modèle agricole pour garantir la production en consommant moins d’eau, mais en organisant une irrigation intelligente, au pied des plantes…
– Elle est trop salie et les usages salissants ne se préoccupent pas assez du traitement, de la séparation eau potable/eau lavage…
La politique de protection et de diversification de la ressource est donc prioritaire, tout comme l’augmentation du rendement de distribution et la chasse aux gaspillages.
Accompagner à la maîtrise des consommations, pour des consommations responsables, ça ne veut pas dire consommer le moins possible d’eau, tout réduire pour battre des records de sobriété. Dans un groupe d’habitants du Défi des familles à énergie positive, une personne avait expliqué qu’elle utilisait l’eau quatre fois, avec une bassine pour les salades, une pour les légumes, une pour la vaisselle, une pour les toilettes, … Si l’expérience était utile au débat sur le niveau de consommation minimum, il ne peut, bien sûr, pas être une consigne de politique publique. Non, nous défendons le droit à l’eau, et tout l’enjeu de notre politique de protection de la ressource, c’est justement de garantir l’accès à l’eau pour tous, et donc aussi d’éviter les mésusages, les gaspillages et, en premier lieu, de faire la chasse aux fuites !
Mais toutes ces actions reposent sur la prise de conscience de sa consommation d’eau, et on sait que trop de familles ne connaissent tout simplement pas leur consommation parce que le coût en est intégré dans des charges avec le chauffage, notamment, ou parce que, au final, la facture d’eau paraît faible quand on fait face à des facteurs d’énergie qui ont explosé et qui sont, pour les familles, le premier poste d’inquiétude. L’eau représente, en moyenne, pour une famille de l’ordre de 15 € par mois pour l’eau potable, 50 € avec assainissement et taxes, mais 4 fois plus pour l’électricité et le chauffage.
C’est pourquoi cette tarification a un double objectif : garantir un droit et aider à le gérer de manière responsable. Pour les premiers m3 gratuits, c’est simple, tout le monde en bénéficie et en sera satisfait, mais pour le seuil de 180m3, c’est plus compliqué. Les hauts revenus ne s’en apercevront pas, l’eau est marginale dans leur budget de consommation. Mais certains vont prendre conscience que leur consommation est élevée, et cela conduira à se poser des questions et, notamment, à renforcer le travail de prévention des fuites.
Cela dit, les élus communistes se sont interrogés sur les impacts de cette hausse pour les grandes familles populaires. La consommation moyenne d’une famille de 5 personnes est estimée à 170m3, mais cela veut dire que certains sont au-dessus. Et il y a des familles de 6, 7 ou plus. Dans les milieux populaires, il y a beaucoup de solidarité qui conduit à des suroccupations liées à des hébergements. Nous sommes très attentifs à ce que cette tarification sociale et environnementale ne soit pas source d’injustices sociales.
C’est tout l’intérêt du versement solidaire créé par cette tarification, qui a pour but de s’assurer qu’aucune famille ne voit la facture d’eau dépasser 3 % de ses revenus. Le mécanisme proposé va demander un travail partenarial avec la CAF, la CARSAT, la MSA (Mutualité sociale agricole), la Métropole. Il demande un décret gouvernemental attendu depuis longtemps, annoncé par Macron en 2022…
Mais il pourrait rester des situations de grandes familles en difficulté et il faudra veiller à ce que l’ensemble des travailleurs sociaux soient mobilisés pour le FSL eau trop faiblement utilisé actuellement.
Les élus communistes ont engagé un travail avec des bailleurs sociaux pour évaluer l’impact. Dans l’habitat collectif avec des compteurs généraux (un compteur de la régie pour quelques dizaines de logements), il n’y aura pas d’impact du tarif doublé, puisque les consommations moyennes seront inférieures à 180m3 et l’application des 12m3 gratuits fera, en général, baisser la facture pour le parc social. Dans le parc social avec des compteurs individuels de la régie, il faudra être attentif aux situations de familles nombreuses, et il y a de grandes maisons hébergeant plusieurs familles avec un seul compteur… Le plus souvent, le versement solidaire suffira à assurer l’absence d’augmentation à consommation constante, nous proposons de mobiliser les travailleurs sociaux des bailleurs et des collectivités pour les situations de grandes familles qui n’auraient pas droit à ce versement ou pour qui ce versement ne suffirait pas, en mobilisant le FSL eau afin de garantir un objectif partagé par tous. Cette tarification ne doit se traduire pour aucune augmentation dans les milieux populaires à consommation constante…
Oui, un tarif incitatif à la maîtrise des consommations, pour les particuliers comme pour les professionnels, est une bonne chose. Tout comme l’installation des premiers compteurs individuels, il y a un siècle, avait fortement réduit les gaspillages, la tarification est l’occasion d’un effort collectif pour chercher un meilleur rendement technique et un meilleur usage…
Nous voterons cette délibération. Je vous remercie.
La vidéo de l’intervention : https://youtu.be/kD0xSZelKiU?t=6246