On ne peut sortir de la crise de l’hébergement d’urgence sans sortir de la crise générale du logement.

Les élus communistes apportent leur contribution au débat de la majorité métropolitaine sur la situation d’urgence de l’hébergement et de l’accueil. Cet été, la Métropole a été dépassée par une nette aggravation des situations de personnes à la rue, et notamment de mères avec de jeunes enfants, et même de nourrissons. Selon la Préfecture, il y avait fin 2023 dans le Rhône, 3 198 personnes sans logement (391 de plus qu’en 2022), 19 566 personnes hébergées chez un tiers (1 485 de plus qu’en 2022), 9 010 en hébergement temporaire (801 de plus qu’en 2022), 6 602 dans un logement insalubre (130 de plus qu’en 2022), 29 709 dont la demande de logement avait plus de deux ans (3 985 de plus qu’en 2022), 6 338 dans un logement inadapté au handicap (449 de moins qu’en 2022, seule situation qui s’est améliorée), 19 523 dans un logement trop petit (1 135 de plus qu’en 2022). Depuis, tout s’est encore aggravé et on risque d’apprendre, en fin d’année, qu’on aura dépassé les 100 000 personnes en situation de mal-logement prioritaire (68 000 en 2020, 83 000 en 2021, 89 000 en 2022, 96 000 en 2023).

Pourtant, le budget 2024 métropolitain poursuivait la forte hausse des dépenses d’hébergement, qui sont passées de 5,6M€ en 2020 à 14,8M€ en 2024. Au total, jamais les capacités d’accueil n’ont été aussi élevées. Malgré cet effort, l’aggravation des situations d’urgence cette année, l’accueil de personnes à la rue venant de la région parisienne en amont des Jeux olympiques, le renvoi de personnes par les autres départements de la Région AURA ou l’explosion des expulsions (+ 24 % depuis 20 ans) ont mis cette politique d’hospitalité et d’hébergement d’urgence en difficulté, rendant très difficile de poursuivre l’accueil inconditionnel de certaines mères avec enfants.

On ne peut réduire cette urgence à des questions juridiques ou de compétences locales. Cela ne ferait que constater la difficulté d’agir sans ouvrir le débat sur les causes de cette situation. C’est toute la politique des gouvernements successifs de l’hébergement, du logement, de l’accueil et de l’immigration qui est un échec aux conséquences inhumaines, injustes et inégales.

C’est l’échec des politiques restrictives d’accueil qui créent toujours plus de situations de non-droits, comme ces familles syriennes que la France ne peut reconduire dans leur pays mais que l’État refuse de régulariser et de loger. Ce sont des centaines de situations, dans l’agglomération lyonnaise, qui sont maintenues dans l’illégalité et la précarité.

L’État laisse s’organiser la concurrence avec les départements voisins qui n’accueillent pas et renvoient les besoins sur la Métropole de Lyon parce qu’elle met en œuvre une politique d’accueil digne, s’appuyant sur une tradition de l’hébergement portée par de grandes associations, renforcée par la majorité de Gauche depuis 2020. Or, la condition pour faire cesser les squats, bidonvilles et marchés de la misère qui dégradent nos villes, c’est d’organiser un accueil digne et responsable de toutes les personnes à la rue, en organisant un véritable service public de l’accueil et de l’accompagnement. Cet accueil digne doit permettre de construire des trajectoires d’insertion. Cela suppose aussi l’action contre les réseaux de trafiquants, de prostitution, d’exploitation de la misère et de la précarité. C’est d’abord une compétence de l’État qui a, bien sûr, les capacités de le faire.

C’est l’échec des politiques du logement d’Emmanuel Macron, qui préfère faciliter les expulsions locatives et faire les poches aux bailleurs sociaux que de construire du logement accessible à tous. La guerre contre le logement social crée une situation de concurrence terrible pour les demandeurs de logement. Dans l’agglomération lyonnaise, 9 demandeurs sont en attente pour chaque bénéficiaire d’un logement. Cela rend impossible la sortie des hébergements pour un logement et, donc, l’accueil en hébergement des derniers arrivés, migrants comme résidents. Et c’est ce dont témoignent aussi les choix budgétaires forts d’Emmanuel Macron, qui préfère consacrer 70 milliards d’euros par an dans la loi de Programmation militaire pour préparer la guerre, 40 fois plus que les dépenses d’hébergement ! Pour notre part, nous refusons la concurrence entre les demandeurs, entre logement et hébergement.

Enfin c’est l’échec de la politique internationale de la France. Comme tout l’Occident atlantiste, elle refuse de reconnaître sa responsabilité dans les situations de guerre et de sous-développement qui sont les premières causes des migrations. On ne peut rien comprendre à l’immigration en ne regardant que l’accueil. Le gouvernement dit vouloir réduire les arrivées, mais il aggrave les causes des départs. D’ailleurs, quand il assume les conséquences d’une guerre, il sait accueillir plus de 100 000 ukrainiens, au moment même où d’autres migrants étaient expulsés. Il contribue, avec l’extrême-Droite, à faire croire que les migrants mettent en péril nos équilibres économiques et sociaux, quand ce sont les coûts des guerres et dépenses militaires qui explosent contre les dépenses utiles de logement, d’éducation, de santé. Nos équilibres sociaux sont, d’abord, mis en cause par l’explosion de la précarité, de l’errance, des addictions, de la grande pauvreté, qui ne concerne pas que les migrants. Non, on ne peut pas s’en sortir avec plus de prisons, de murs et de soldats dans les pays du Sud ; c’est un cercle vicieux qui ne peut qu’alimenter les tensions et les guerres, donc les migrations.

Le dialogue se poursuit dans la majorité métropolitaine pour trouver des solutions permettant la mise à l’abri de toutes les mères isolées avec enfants en bas âge. Les communistes souhaitent contribuer à des initiatives qui unissent toutes les situations d’urgence et de mal-logement. Nous appelons à un dialogue entre élus, militants, citoyens sur ces questions qui divisent notre peuple. On ne peut défendre une situation particulière en ignorant les autres, une catégorie de demandeurs en ignorant les autres, une mère isolée avec nourrisson à la rue et pas une mère non isolée, ou avec un enfant de 3 ans et un jour. Il faut faire converger toutes les actions contre le mal-logement, pour les personnes à la rue, comme pour celles menacées d’expulsion, exploitées par des trafiquants dans un squat, en situation dramatique de suroccupation aggravée, pour les personnes âgées ou handicapées enfermées dans un logement en étage non accessible…

C’est pourquoi, nous demandons que la Métropole renforce sa politique d’hospitalité et nous appelons à unir tous les demandeurs de logement ou d’hébergement et à interpeller les politiques publiques nationales et l’ensemble des acteurs du logement et de l’hébergement.

Un nouveau ministre du Logement doit enfin prendre des décisions en rupture avec celles impulsées par les gouvernements successifs depuis 20 ans. Il faut réaffecter d’urgence deux milliards d’euros des dépenses militaires, un milliard d’euros pour le logement et un milliard d’euros pour l’hébergement. Nous demandons également que soit posée la question de la réquisition des logements et immeubles de bureaux laissés vacants à des fins spéculatives, afin de les mobiliser pour satisfaire aux besoins humains fondamentaux de notre population.

On ne peut sortir de la crise de l’hébergement d’urgence sans sortir de cette terrible crise générale du logement.

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