Mme la Conseillère BURRICAND : Monsieur le Président, chers collègues, fabricante, attirante, apprenante, entraînante, avec monsieur le Vice-Président, la Métropole, c’est une vraie valse à mille temps ! Mais la valse est éphémère et pour nos concitoyens, souvent après, c’est le piétinement dans une vie qui est marquée à la fois par les difficultés de l’emploi et par les difficultés du pouvoir d’achat.
Cette délibération s’inspire directement du projet de Schéma de développement économique que vous nous aviez présenté le 30 mai 2016. À ce moment-là, nous avions émis un certain nombre de réserves quant à ce projet, réserves qui demeurent aujourd’hui.
Nous ne tenons par pour rien le travail de concertation, même si les forces syndicales ne sont citées que de manière anecdotique et nous ne tenons pas pour rien le nombre d’actions et de propositions déclinées dans ce document. Par exemple, la volonté affirmée de maintenir le socle industriel pourvoyeur de 18 % des emplois, ni la volonté de favoriser le développement des PME, PMI, ni l’effort sur le développement de l’emploi avec l’économie sociale et solidaire, même si nous en mesurons les limites. Encore que nous serions plus convaincus si vous nous détailliez plus précisément la nature de ces emplois industriels (cadres, chercheurs, ouvriers, techniciens, employés) comme nous souhaiterions que soit mieux contrôlée l’utilisation des fonds publics versés aux entreprises quant à la réalité des créations d’emplois.
Mais cette délibération s’inscrit bien dans ce modèle européen de concurrence libre et non faussée, concurrence entre les salariés, les territoires et, au final, nous ne croyons pas à la République autonome de Lyon. Nous ne croyons pas que nos Métropoles, nos Régions, nos Communes puissent s’exonérer des effets d’une politique nationale et européenne néfaste -et cela a commencé bien avant ce Gouvernement-, politiques qui ont cassé l’emploi privé et public, qui ont détruit une bonne partie du tissu industriel français, qui continuent de le faire tout en laissant les mains toujours plus libres au patronat pour délocaliser, faire baisser le coût du travail, jusqu’à cette loi El Khomri dont il faut empêcher maintenant la mise en œuvre dans les entreprises. Il suffit d’ailleurs d’aller sur le site de la Région pour voir qu’il n’y a guère de différence entre vous et le Président Wauquiez quant aux objectifs… (rumeurs dans la salle) -Mais laissez-moi finir ! Et oui !- …Donc il n’y a guère différence entre vous et le Président Wauquiez quant aux objectifs, priorités et méthodes, à part la préférence locale affirmée ; il faut bien qu’il rappelle les thèmes de sa campagne.
Tout cela est bien loin de la vie réelle de nos concitoyens. Ceux qui galèrent dans la précarité craignent de perdre leur emploi dans des entreprises qui ne sont pas considérées comme innovantes ou à fort potentiel de croissance ou qui savent tout simplement, même dans des entreprises innovantes ou à potentiel de croissance, qu’ils sont à la merci d’une délocalisation pour des salariés qu’on peut payer moins. Nous ne vous imposerons pas, monsieur le Président, ni à mes collègues, la liste des suppressions d’emplois, des fermetures d’entreprises et de disparition de sites industriels qui émaillent les vingt dernières années et les vingt derniers mois dans notre agglomération et à Lyon-même ; vous les connaissez sûrement. Ce sont les coulisses invisibles de cette vitrine que vous nous présentez aujourd’hui.
Et, bien sûr, le solde d’emplois est positif dans la Métropole mais le solde pour ceux qui ne trouvent pas d’emploi ou pour ceux qui n’en ont pas retrouvé est bien, lui, négatif. Et vous connaissez les chiffres : 3 945 bénéficiaires du Revenu de solidarité active (RSA) fin mars 2016, plus de 116 900 demandeurs d’emplois, 9,2 % de chômeurs dans la Région urbaine lyonnaise mais 18 % pour la Métropole, ce qui représente le taux de demandeurs d’emplois le plus élevé de l’aire urbaine ; et, au sein de la Métropole, un quart des actifs est demandeur d’emploi dans les Conférences des Maires Rhône-Amont et Portes du sud. Depuis 2007, on a compté plus de 50 000 demandeurs d’emplois supplémentaires, soit plus de 82 % dans la Métropole.
C’est pourquoi nous préfèrerions qu’en nous parlant de ce Schéma de développement, vous ayez annoncé deux objectifs essentiels : la réduction du chômage et celle des inégalités. Mais ce ne sont visiblement pas vos priorités. Nous préfèrerions que les hommes politiques réfléchissent un peu plus à la question des salaires et aux conséquences de leur baisse sur l’activité économique en France et dans la Métropole.
Nous aimerions réfléchir un peu plus avec vous sur la question des inégalités territoriales, dont nous ne croyons pas qu’elles puissent se résoudre par une meilleure répartition des pauvres mais plutôt par la disparition des bas revenus. Et oui, monsieur le Président, la Métropole fait beaucoup mais elle n’a rien changé à un fait historique de notre agglomération qui témoigne de la ségrégation territoriale : les revenus les plus riches sont toujours à Écully ou à Limonest et les plus pauvres à Vénissieux… (Rumeurs dans la salle) -Mais ce sont les chiffres- …et les plus pauvres à Vénissieux, Vaulx en Velin et Saint Fons. Et la pauvreté a continué à progresser dans la Métropole avec des écarts entre les revenus les plus bas et les plus élevés importants jusque dans la ville centre qui est Lyon.
Monsieur le Président, ce schéma satisfera sans doute une partie des décideurs économiques de la Métropole et je ne conteste pas qu’il puisse être une bonne base de discussion avec la Région, mais il n’est en aucun cas à la hauteur des difficultés de l’emploi et des revenus auxquelles sont confrontés les habitants et il n’en affiche pas l’ambition.
C’est pourquoi nous nous abstiendrons sur cette délibération.